samedi 11 novembre 2023

Cet obscur objet du désir

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Cet obscur objet du désir (1977) de Luis Buñuel


A la gare de Séville, au départ du train pour Madrid, un homme mûr jette du train un seau d’eau à la figure d’une jeune femme qui s’apprêtait à monter.

Devant la surprise de ses compagnons de compartiment, l’homme, Matteo, raconte son histoire.

Il a connu la jeune femme, Conchita, lorsqu’elle fut engagée comme bonne par son majordome. Après avoir (mal) servi le dîner, Conchita quitte la maison de Matteo qui, fasciné par la jeune femme, ne sait comment la retrouver. Et c’est par hasard qu’il la retrouve à Lausanne. Dés lors, il ne la lâche plus, se met à l’entretenir, ainsi que sa mère, mais n’obtient rien d’elle.

Puis, Conchita disparaît de nouveau avant de réapparaître.

Le roman de Pierre Louÿs n’a jamais eu beaucoup de chance avec le cinéma. Passons sur les versions de Reginald Barker (1920) et de Jacques de Baroncelli (1929), difficiles à voir. La Pasion desnuda de Luis Cesar Amadori (1952) est inédit en France. Restent les trois versions connues : Sternberg (1935), Duvivier (1958) et Buñuel.

Bien que très attaché à son sujet, ou peut-être parce qu’il était trop attaché à son sujet, Sternberg ne fit pas de son adaptation un de ses meilleurs films. Glissons pudiquement sur celle de Duvivier dont tout le monde s’accorde à dire que c’est un des plus mauvais films du réalisateur.

Reste donc Buñuel, un Buñuel vieillissant, flanqué du collaborateur de ses vieux jours, Jean-Claude Carrière, déjà co-scénariste de l’original Charme discret de la bourgeoisie et du très surestimé Fantôme de la liberté. N’en déplaise à ses nombreux hagiographes, cette version de La Femme et le pantin n’est pas une grande réussite.

L’originalité vient d’un petit truc de réalisation qui a consisté en l’interprétation du rôle de Conchita par deux comédiennes distinctes, Carole Bouquet et Angela Molina. Les thuriféraires susnommés s’empressèrent de donner de pertinentes explications, toutes plus oiseuses les unes que les autres, à ce qui nous semble être aujourd’hui au mieux un caprice de surréaliste gâteux, au pire, la symbolique lourde de la séduction et du refus, thèse très répandue chez les Buñuéliens et qui, naturellement, ne résiste pas à l’analyse : Conchita-Bouquet aguiche autant que Conchita-Molina, Conchita-Molina se refuse autant que Conchita-Bouquet. Il semble donc que le truc en question s’il est rigolo, n’en est pas moins complètement gratuit.

Cependant, il faut bien avouer qu’un Buñuel à bout de souffle et qu’un Carrière asthmatique n’expliquent pas, à eux seuls, la répétitivité fadasse d’un scénario anémique qui ne fait que tourner en rond pendant plus d’une heure et demie. Le portrait de la femme fatale brossé par Pierre Louÿs en 1897, pour nouveau qu’il fut alors, a été depuis balayé par des femmes fatales autrement plus efficaces que cette péronnelle qui trouve un malin plaisir à simplement refuser à ce vieux frustré de - passez-moi l’expression- lui dégorger le poireau.

Dés lors, Buñuel se complait à truffer son film d’attentats terroristes, de plaisanteries anti-cléricales et de potacheries « surréalistes » et suffisantes. Ce qui n’intéresse plus personne.

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