lundi 3 août 2020

The Activist


Affiche du film The Activist - Affiche 1 sur 1 - AlloCiné **
The Activist (2014) de Cyril Morin
Wounded Knee, février 1973.
Dans cette petite ville du Dakota du Sud (tristement célèbre pour avoir été,  en février 1890, le haut lieu d’un fait glorieux perpétré la glorieuse armée des Etats-Unis d’Amérique, à savoir l’assassinat pur et simple de 350 Amérindiens de tous âges et des deux sexes) et quatre-vingt trois ans après les faits, Marvin Brown et Bud Ward, deux activistes de la cause amérindienne  (l’un d’eux est le jeune veuf d’une Indienne morte dans des circonstances suspectes et l’autre est le cousin de cette Indienne) sont arrêtés par deux flics locaux.
Mais très rapidement, le poste reçoit la visite d’un « conseiller » du président Nixon, suivi du « don » d’un poste de radio (dûment et secrètement équipé d’un micro), alors qu’une mystérieuse camionnette stationne à proximité du poste de police.
Le problème des réalisateurs débutants, c’est que, depuis 1941 et un certain Citizen Kane d’un jeune réalisateur débutant nommé Orson Welles, ils sont tous persuadés depuis l’enfance qu’ils sont LE nouvel Orson Welles.
Ils oublient un peu vite que Welles était déjà un cinéaste amateur, un réalisateur radio et un génial touche-à-tout, ce que tout le monde ne peut pas être.
Ils « s’amusent » donc à s’imposer des trucs que certains réalisateurs chevronnés ne font que contraints et forcés.
Ici, c’est le huis-clos dans la petite prison d’un poste de police, pendant les évènements de Wounded Knee aux temps peu glorieux de la présidence du mafieux Nixon.
Tout cela est assez poussif, même si la réalisation est bien mieux maîtrisée que le récit et si l’interprétation, sans être stupéfiante, réussit à être convaincante.
En revanche, Cyril Morin réussit assez bien à distiller le climat délétère et paranoïaque, instauré par la clique de gangsters protofascistes, descendants directs des McCarthy et autres J. Edgar Hoover (congédié, du reste, pendant les années Nixon : les paranos s’éliminent entre eux, c’est normal !) et ancêtres eux-mêmes des Reagan et des tarés Bush, père et fils[1].
Tout cela est très sympathique, mais ne hisse pas ce film auquel on voudrait souscrire au rang d’inoubliable.


[1] On a eu mieux depuis !...

dimanche 2 août 2020

Chained / Beloved

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Beloved - film 2019 - AlloCiné **
Eynayim Sheli (Chained) de Yaron Shani (2019)
Rashi vit en couple avec Avigail. Il est policier à Tel-Aviv. Consciencieux et professionnel, il ne laisse rien passer.
Après avoir interpellé une « bande de jeunes » dans un parc de la ville, il pratique sur eux une fouille à corps sans témoin, ce que la loi interdit.
Alors qu’il est suspendu et qu’il fait l’objet d’une enquête par la police des polices, ses rapports avec Avigail qui vient de faire une fausse couche de plus se détériorent. Qui plus est, Yasmin, la fille d’Avigail, ne le supporte plus.

*
Leyd’a (Beloved) de Yaron Shani (2019)
Avigail vit en couple avec Rashi.
Depuis des années, le couple se bat pour avoir un enfant, mais Avigail vient de faire une fausse couche de plus.
C’est à ce moment qu’elle commence à ne plus supporter la tyrannie de Rashi que son éviction de la police rend encore plus intransigeant.
A l’hôpital où elle travaille, elle fait la connaissance de Yaela et Na’ama Efrati, les filles d’un résident. Avec Yael et certaines de ses amies, elle découvre un groupe de femmes très complices.



En 1963, André Cayatte tournait un diptyque, Françoise ou la vie conjugale et Jean-Marc ou la vie conjugale. Il s’agissait, en fait, de l’histoire, au demeurant pas franchement palpitante, d’un couple vue par madame, Françoise, et par monsieur, Jean-Marc. C’était complètement raté, mais la démarche était intéressante : montrer exactement la même histoire vue par ses deux protagonistes, plutôt antagonistes en l’occurrence.
Chained et Beloved nous sont présentés comme tels, mais c’est complètement faux.
En fait, mises à part la fausse couche d’Avigail et la séparation du couple Rashi/Avigail, il n’y a rien en commun dans les deux films.
Pour fasciner, il eut fallu autre chose que les aboiements d’un tyran domestique et les atermoiements d’une gourdiflotte.
Si Chained est très légèrement plus long que Beloved, il est quand même plus intéressant et on ne s’y ennuie pas contrairement à Beloved.
Chained gêne un peu, car on voudrait faire taire Rashi, mais Beloved est insupportable, car on voudrait secouer Avigail.
Au tout début de Chained, on se met du côté de Rashi, mais très rapidement, on ne supporte plus ce bulldozer qui ne permet jamais à ses interlocuteurs de finir ne serait-ce qu’une phrase. C’est pire dans Beloved (surtout quand on le voit dans la foulée de Chained) et on en vient à se dire qu’on ne supporte plus ceux qui n’écoutent pas et qui coupent la parole !
Le « pendant tyrannique féminin » de Rashi, c’est Na’ama la sœur hystérique de Yael. Nous avons droit à une bagarre « hystérisée » par le réalisateur entre les deux sœurs qui a fait fuir deux ou trois personnes dans la salle où j’ai vu le film ; j’ai moi-même pensé que je n’en supporterai pas une minute de plus. Cette agressivité de Na’ama est surjouée par Leah Tonic (qui voulait peut-être justifier son patronyme !) comme elle surjoue sa soudaine gentillesse-complicité avec sa sœur un peu plus tard.
Quant aux scènes vaguement saphiques des dames « babacools », elles sont interminables et particulièrement faux culs (si je puis dire ! ...) : on ne voit ni scène de sexe, ni drogue, mais c’est quand même à ça qu’on pense.
D’ailleurs, il règne sur tout ça une « pudibonderie voyeuriste » avec certains plans (totalement inutiles) où l’on montre des sexes (masculins) en les floutant, alors qu’il eût été beaucoup plus simple de ne pas les montrer du tout ! Il en va de même pour les seins des « babacools » qui sont également floutés (nous sommes tout de même en 2020 et on voit seins sur n’importe quelle plage !).
Côté casting, si Eran Naim (Rashi) s’en tire plutôt bien, on a constamment envie de tarter Stav Almagor (Avigail).
Je n’avais pas un souvenir ébloui d’Ajami, mais c’était quand même mieux que ça !

samedi 1 août 2020

La Chasse aux sorcières


La Chasse aux sorcières - Film (1996) - SensCritique *
The Crucible (La Chasse aux sorcières) de Nicholas Hytner (1996)

En 1692, dans la petite ville de Salem (Massachusetts), les jeunes filles se rendent en grand secret dans les bois pour participer à une sorte de sabbat. Elles sont surprises par le pasteur Parris et s’enfuient.
Mais le lendemain, la fille de Parris tombe dans une sorte de catalepsie, ainsi que la fille des Puttnam dont c’est l’enfant unique après la mort en bas âge de leur nombreuse progéniture, décès que ces puritains bourgeois ont toujours imputés aux maléfices de « créatures possédées ».
Et l’accusation de sorcellerie commence à circuler. La jeune Abigail, nièce de Parris, conjure son oncle de dire la vérité sur le sabbat, mais « le révérend », conscient que cette révélation pourrait nuire à ses ambitions sociales et politiques, n’en fait rien. Et Abigail ne tarde pas à réaliser que cette histoire de « possédées » pourrait l’aider à se débarrasser d’Elizabeth Proctor qui l’a chassée parce qu’elle tournait autour de John Proctor, son mari. C’est aussi une occasion pour Abigail d’avoir John Proctor pour elle.
Arthur Miller écrivit sa pièce en 1953 après avoir été inquiété par la tristement célèbre « HUAC » commission des activités anti-américaines.
Les procès de cette commission, tel qu’on peut les voir dans les documents d’époque, évoquent incontestablement les procès en sorcellerie : impossibilité pour les accusés de se défendre, irrationalité de l’accusation et volonté de briser l’individu pour le pousser à la dénonciation d’autres « sorcières » et à l’aveu, même mensonger, en échange de la relaxe.
Contrairement à ce que le titre français de cette version-ci laisse entendre, le parallèle avec « la chasse aux sorcières » est passé ici aux oubliettes au profit d’un film à costumes. L’interprétation est solide, mais ne suffit pas à dépasser Les Sorcières de Salem, première adaptation cinématographique de la pièce de Miller, production française bien plus fidèle à l’original que cette adaptation-ci à laquelle, pourtant, Miller collabora.
Winona Ryder, Daniel Day Lewis et les autres se donnent beaucoup de mal pour faire oublier Mylène Demongeot, Yves Montand et Simone Signoret, en pure perte. Et Nicholas Hytner, peut-être moins impliqué que son collègue français, ne peut rivaliser avec Raymond Rouleau qui n’était pourtant pas le réalisateur du siècle.