dimanche 30 novembre 2025

Charlie Chan en Egypte


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Charlie Chan in Egypt (Charlie Chan en Egypte) de Luis King (1935)


Peu après qu’il a eu découvert la tombe du pharaon, le professeur Arnold, célèbre égyptologue, a disparu. Sa fille Carol demande à Charlie Chan, venu en Egypte chercher les objets trouvés dans les tombes pour le compte d’un musée français, de retrouver son père.

 

Mais c’est le cadavre du savant que Charlie Chan retrouve dans le sarcophage de la momie du pharaon.

Earl Derr Biggers avait écrit une série de nouvelles dont le héros était un détective chinois parlant un anglais assez « petit nègre » et citant Confucius tous les trois mots. La Twentieth Century Fox acquit les droits du personnage et ne réalisa pas moins de 27 films entre 1931 et 1941. La Monogram reprendra le flambeau de la Fox en produisant 12 Charlie Chan entre 1944 et 1949.

Dans les quinze premiers films de la série, c’est un comédien d’origine suédoise, Warner Oland, qui interprète ce détective chinois plus chinois que nature. Après sa mort en 1937, Sydney Toler prît le relais pour les 21 films suivants, puis Roland Winters pour les trois derniers. On peut mentionner le personnage de monsieur Wang, parodie de Charlie Chan dans Murder by Death (Un cadavre au dessert) de Neil Simon, interprété par Peter Sellers dans la version cinéma de cette pièce réalisée par Robert Moore en 1976.

Charlie Chan est typiquement le genre de série qui nous rappelle que le terme « Série B » ne se réfère nullement à un quelconque manque de qualité, mais à certaines productions se caractérisant principalement par l’absence de vedettes, un scénario vite écrit et une réalisation vite tournée, le tout par de bons artisans ou des débutants, et, surtout, une durée n’excédant pas 70 minutes puisque le terme « Série B » se traduit dans ce cas précis par « Double Feature », films de double programme.

Ici, Charlie Chan ne cite Confucius qu’une fois, mais son air matois et son sabir invraisemblable font merveille et son excessive courtoisie est d’autant plus drôle qu’elle rencontre ici les « salamalecs » d’un policier égyptien.

Bien qu’un peu daté, le film possède un charme indéniable sur le thème rebattu de la pseudo-malédiction de la momie cachant les visées mercantiles d’un assassin bien réel.

jeudi 27 novembre 2025

Une belle fin


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Still Life (Une belle fin) de d’Uberto Pasolini (2012)

John May est fonctionnaire dans un service un peu particulier : c’est le service qui s’occupe de chercher pour des personnes récemment décédées, visiblement isolées, des proches, parents ou amis qui pourraient hériter et, surtout, assister aux funérailles.

Souvent, il s’y retrouve seul mais il tient à y être s’il n’y a personne d’autre et, armés de deux ou trois CD, il fait passer une musique qui lui semble appropriée avant l’éloge funèbre qu’il a lui-même rédigée.

Malheureusement, on lui reproche d’être un peu trop tatillon et de faire preuve d’un peu trop de conscience professionnelle. Et on lui annonce la disparition prochaine de son poste.

Un jour, sur son bureau, il trouve un nouveau dossier : le décédé est Bill Stocke, un de ses voisins.

23 avril 2015 – rédigé le 4 mai 2015

De la confiture pour un cochon !

La confiture, c’est le film et, j’ose le dire, le cochon, c’est moi !

Une belle fin est un film émouvant, sagement réalisé (un peu trop peut-être !) et remarquablement interprété, non seulement par Eddie Marsan, mais par l’ensemble de la distribution.

Et la fin du film nous fait penser au fameux Petit cheval blanc de Paul Fort, immortalisé par Brassens.

Peut-être le plan-séquence final est-il un peu « trop » !

Mais tout le reste est impeccable, enfin, à ce qu’il m’a semblé lorsque je réussissais à ne pas dormir : voilà le pourquoi du cochon cité plus haut !

Du coup, une deuxième projection s’impose !

11 mai 2015 – rédigé le 22 mai 2015

Deux semaines plus tard, je suis donc retourné voir ce si joli film que j’avais si mal vu.

Bien sûr, j’ai pu ainsi « combler les vides » de ma première (déplorable) vision.

En fait, l’expérience s’est avérée très intéressante. Par exemple, le plan de l’appartement de Kelly avec ce fauteuil dont l’un des pieds est remplacé par une pile de livres, très exactement comme chez son père, ce que je n’avais pas vu la première fois.

Et le dernier plan que j’avais trouvé un peu « trop », m’a ému beaucoup plus que je ne m’y attendais pour un film que j’avais déjà vu.

Alors, bien sûr, on peut estimer comme les critiques que tout cela est « platounet », « aussi rangé que le bureau de John May », mais pour une fois que des bons sentiments donnent autre chose qu’un médiocre navet écœurant de pathos, on aurait tort de bouder son plaisir.

mardi 25 novembre 2025

Charlie Chan at Treasure Island

 


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Charlie Chan at Treasure Island (1939) de Norman Foster

En provenance d’Honolulu, Charlie Chan et son fils Jimmy rentrent à San Francisco. Alors que leur hydravion survole « Treasure Island », le grand parc d’attraction de la ville, leur ami Paul Essex, auteur à succès de romans policiers, meurt peu après qu’il leur a annoncé fièrement l’achèvement de son dernier roman et surtout après qu’il a reçu un télégramme le menaçant de mort où il est question de « Zodiaque ».

 

Or, Zodiaque est le nom d’un magicien à la mode, un spirite adulé par les uns et accusé par les autres d’être un escroc. Parmi ces détracteurs, le magicien Khadini et le journaliste Pete Lewis vont aider Charlie Chan à établir clairement le rapport qui existe entre ce « professeur » Zodiaque et la mort de Paul Essex.

Depuis l’année précédente, Sidney Toler a succédé à Warner Oland dans le rôle du détective chinois né sous la plume d’Earl Derr Biggers. Des « Serials » du muet au « Sequels » actuelles, de Fantomas ou Fu-Manchu à James Bond, il n’a jamais été facile pour un acteur de prendre la relève d’un collègue dans le rôle d’un héros à succès, surtout lorsque celui-ci a atteint une forte côte de popularité et tout particulièrement lorsque cette succession s’est faite à la suite du décès du titulaire du rôle (ce qui est la cas ici).

Sidney Toler, plus rond et moins « Chinois » que le Suédois Warner Oland, s’en tire plutôt bien. Mais on peut facilement imaginer qu’il eut du mal à s’imposer auprès du public, même si, avec ses 21 films, Toler aura été, des trois comédiens qui ont interprété Charlie Chan, celui qui a le plus endossé le costume du célèbre détective (Warner Oland a tourné 16 Charlie Chan et Roland Winters succédera à Toler pour les 6 derniers films de la série). Entretemps, la petite Monogram succèdera à la « Major » Twentieth Century Fox à la suite de l’essoufflement de ladite Fox sur cette série.

Mais nous sommes encore ici dans la bonne période, celle des séries B parfaitement maîtrisées par des vieux routiers d’Hollywood sur un scénario au cordeau et aux rebondissements savamment dosés. La distribution, comme toujours très homogène, est excellente bien que constituée d’acteurs aujourd’hui inconnus si l’on excepte, dans le rôle du magicien Rhadini, Cesar Romero qui deviendra un spécialiste des rôles de play-boys latinos plutôt veules ou carrément méchants. Il sera, entre autres, le jouet de Conchita dans la version de Sternberg de La Femme et le pantin avec Marlene Dietrich.

lundi 24 novembre 2025

Hypnose

 


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Stir of Echoes (Hypnose) de David Koepp (1999)

Tom Witzky est ouvrier et habite avec sa femme et son fils à Chicago. Le fils de Tom s’entretient fréquemment avec une interlocutrice que personne ne voit.

Lors d’une soirée, sa belle-sœur hypnotise Tom. A partir de ce moment, Tom est hanté par des images très violentes auxquelles il ne comprend rien. Un soir, sur son canapé, il voit Samantha qui est précisément l’interlocutrice de son fils.

Il s’agit d’une jeune fille qui a disparu depuis six mois et que tout le monde pense fugueuse.

Le comportement de Tom semble de plus en plus étrange à son entourage et tout particulièrement à sa femme.

On sent une certaine ambition à la  base. Le scénario accumule les détails censés avoir une certaine importance (la grossesse de la femme de Tom, les visions de l’enfant, le flic médium…) et qui seront abandonnés en cours de chemin. Certaines pages du scénario semblent avoir été perdues. Plus vraisemblablement, le scénario se perd lui-même pour aboutir à un dénouement d’une banalité affligeante.

Si on ajoute une réalisation molle qui se donne des airs à l’aide d’une bande son excessivement agressive et désagréable, on se retrouve avec un banal téléfilm à prétention fantastique. Kevin Bacon et Illeana Douglas sont très bien.

dimanche 23 novembre 2025

Charlie Chan aux courses

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Charlie Chan at the Race Track (
Charlie Chan aux courses)

de H. Bruce Humberstone (1936) (Ciné-Classics – 05/08/01 - V.O. Stf – 67mn - HiFi-Idx – NB)

Lors d’une course de chevaux à Melbourne, la cheval Avalanche, qui devrait gagner, commet une faute : il est disqualifié. Mais cette faute a été provoquée par le jockey qui, pour cela, a été corrompu par un gang.

 

Sur le bateau qui ramène les chevaux vers les Etats-Unis en vue du handicap de Los Angeles, le major Kent, un ami de Charlie Chan, est assassiné. De plus, des lettres anonymes menaçantes sont envoyées à toutes les personnes concernées par les courses de chevaux. A la faveur d’un incendie criminel, Avalanche est échangé contre un autre cheval, ce que Charlie Chan soupçonne tout de suite.

Plus on avance, plus la série se bonifie. H. Bruce Humberstone est ici au commande. Excellent réalisateur de série B pour la Fox, il imprime à cet épisode un rythme et une élégance qui n’étaient pas toujours évident dans les films précédents. De plus, au bout de 12 films, la série a trouvé son rythme de croisière.

On retrouve ici, outre, naturellement, Warner Oland dans le rôle-titre, Thomas Beck, déjà jeune premier dans Charlie Chan in Egypt, et John H. Allen fait une prestation plaisante, mais assez convenue, de « nègre » geignard et peureux, personnage assez récurrent dans les films de ce type à cette époque-là. Le scénario est moins simpliste que dans les précédents et la qualité technique n’a rien à envier aux séries A.

Stoker

 


Stoker
(2013) de Park Chan-wok

 Evelyn Stoker vient de perdre son mari dans un accident de voiture. Leur fille India, vit très mal la mort de son père et, sans raison apparente, elle en veut à sa mère.

Le jour de l’enterrement, Charles Stoker débarque : Charles était le frère du défunt, mais personne ne le connait.

India se méfie immédiatement de cet oncle tombé du ciel et au comportement inquiétant.

Le titre fait, paraît-il, allusion à l’auteur de Dracula. D’autres clins d’œil au roman de l’écrivain irlandais sont, toujours paraît-il, présents tout au long du film.

Bon ! Moi, je veux bien !

Mais j’ai plutôt tendance à penser à un film qui est, pour moi, un des plus mauvais d’Hitchcock, L’Ombre d’un doute qui est un pensum dans lequel le rôle du méchant ambigu est tenu par ce grand benêt de Joseph Cotten, ce qui n’arrange évidemment pas les choses !

Ici, au niveau de l’interprétation, si Mia Wasikowska s’en tire plutôt pas mal dans le rôle d’India, Matthew Goode, l’inquiétant oncle Charles est aussi insipide que l’oncle Charlie d’Hitchcock tandis que Nicole Kidman semble avoir joué sous anxiolytique.

De plus, le film donne l’impression de penser très au-dessus de ses très modestes moyens. Bref, c’est un produit insipide, long et prétentieux, fort heureusement vite oublié.

samedi 22 novembre 2025

Charlie Chan at the Wax Museum

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Charlie Chan at the Wax Museum
(1940) de Norman Foster

Stephen Mac Burney dont Charlie Chan a contribué à l’arrestation s’évade alors qu’il vient d’être condamné à mort. Il se réfugie au musée de cire du docteur Cream qui fut un fameux chirurgien esthétique et qui travaille encore pour la pègre.

 

Et c’est le docteur Cream qui va lancer un défi à Charlie Chan : lors d’une émission de radio retransmise depuis le musée de cire, il va revenir sur une ancienne affaire pour laquelle, selon lui, un innocent a été exécuté. Or, Mac Burney était mêlé à l’affaire et il compte bien tuer Charlie Chan au cours de la soirée.

Après Charlie Chan at the Wax Museum, l’essoufflement de la série entraîne le retrait de la Fox qui ne produira plus que quatre Charlie Chan. La Monogram prendra le relais, toujours avec Sidney Toler, puis avec Roland Winters pour les six derniers films.

L’impression que laisse ce Charlie Chan at the Wax Museum est assez mitigée : on y sent beaucoup plus que dans les précédents films, les contingences économiques propres aux séries B, notamment du fait d’un décor pratiquement unique. Paradoxalement, c’est ce décor unique qui donne un certain charme au film. Mais le scénario semble avoir été écrit à la va-vite et/ou « à la fainéante », basé sur une ancienne enquête du détective chinois dont on ignore tout, ce qui permet aux scénaristes des pannes d’inspiration censées passer inaperçues, mais qui marque bel et bien le déclin de la série.

Charlie Chan à l’Opéra


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Charlie Chan at the Opera (Charlie Chan à l’Opéra)

de H. Bruce Humberstone (1937)

Après avoir vu un article sur la diva Lilly Rochelle, un amnésique enfermé dans un asile psychiatrique assassine le gardien et s’enfuit. La police de Los Angeles le recherche activement et le chef de la police fait appel à Charlie Chan.

Lily Rochelle, affolée, va voir le chef de la police : elle a reçu des menaces de mort.

Le soir-même, c’est la grande première de l’opéra Carnival. Gravelle, une basse disparue lors de l’incendie d’un opéra, est l’amnésique recherché. Il était le partenaire de Lily Rochelle dans Carnival. Il est revenu reprendre sa place dans le rôle du diable.

Excellente cuvée que cet opus 12 des aventures du célèbre détective chinois. L’argument est franchement démarqué de notre Gaston Leroux national et de son Fantôme de l’Opéra. La similitude est encore accentuée par l’opéra Carnival d’Oscar levant qui se démarque, lui, de Faust, déjà présent chez Leroux. Quarante ans plus tard, Brian de Palma reprendra ces deux histoires mythiques en ajoutant un troisième mythe (Le Portrait de Dorian Gray) pour son fameux Phantom of the Paradise… devenu mythique à son tour.

Mais avec Charlie Chan, nous restons de plain-pied dans la série B. Warner Oland incarne le détective pour l’une des dernières fois et il y a, ici encore, plus d’humour que dans les films précédents de la série : le régisseur poursuit un Chinois (le fils de Charlie Chan) qui s’est caché parmi les figurants habillés en soldats et casqués. Lorsqu’il leur fait retirer leurs casques, ils sont tous Chinois. Un autre gag : le même régisseur déclare « Cet opéra aura lieu ce soir, même si Frankenstein lui-même arrive ! ». Et celui qui arrivera, c’est Gravelle, interprété par… Boris Karloff.

On sent d’ailleurs parfaitement que l’argument publicitaire du film à l’époque devait être « Charlie Chan contre Frankenstein ».

Une fois de plus, le rythme est vif, les personnages bien campés et, ma foi, tout cela est bien agréable.

jeudi 20 novembre 2025

The Strange Ones


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The Strange Ones (2017) de Christopher Radcliff et Lauren Wolkestein

Sam et Nick traversent le pays à bord de leur voiture.

Sam est un gamin de 10 à 12 ans alors que Nick est un jeune homme. Ceux qui les voient supposent qu’ils sont deux frères.

Ils fuient visiblement la société des autres et finissent par décider d’aller camper en forêt.

Ça aurait pu être bien !

Ce jeune adulte et ce garçon sont-ils frères (le jeune homme est trop jeune et le garçon trop vieux pour qu’ils soient père et fils) ? Sinon que sont-ils ?

Mais comme il ne se passe rien pour résoudre cette énigme, on se laisse porter en se demandant où tout cela va nous mener.

Et visiblement, les réalisateurs-scénaristes n’en savent rien non plus.

Alors tout ce qui nous reste, ce sont de très belles images de sous-bois, puisque la dernière partie du film se passe en forêt et c’est là qu’on aura les réponses aux questions qu’on ne se pose plus depuis une heure.

En plus des belles images, il y a la qualité du casting avec Alex Pettyfer et surtout James Freedson-Jackson le stupéfiant jeune Sam.

lundi 17 novembre 2025

Le Char et l’olivier, une autre histoire de la Palestine

 


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Le Char et l’olivier, une autre histoire de la Palestine (2019) de Roland Nurier

Fondée au 2ème siècle avant Jésus-Christ, la Palestine va connaître des siècles de domination ottomane.

Après la première guerre mondiale et le dépeçage de l’empire ottoman, la France et l’Angleterre se partagent les pays du Moyen-Orient.

Alors que les « Palestiniens » se sentent de plus en plus envahis par les Juifs sionistes venus du Mittel Europa pour fuir les pogroms, les Anglais gèrent le pays.

Après la deuxième guerre mondiale et la Shoah, l’Organisation des Nations Unies fonde l’État d’Israël sans vraiment se préoccuper du sort des Palestiniens.

 70 ans plus tard, la guerre dure toujours.

« Si j’étais un leader arabe, je ne signerais jamais un accord avec Israël » dit David Ben Gourion avant d’ajouter : « C’est normal nous avons pris leur pays… Pourquoi devrait-il accepter cela ? »

Depuis 1897, Theodor Herzl, journaliste et écrivain austro-hongrois, prône la création d’un état juif en réponse à tous les pogroms qui éclatent depuis plus de dix ans dans les pays de l’est européen et en Russie.

La Palestine, sous mandat britannique, verra débarquer un certain contingent de ces Juifs qui ont fui l’Europe.

Un autre contingent arrivera dans les années 30 pendant la montée du nazisme en Allemagne et dans les pays fascistes. Les Britanniques empêcheront, dès lors, les Juifs d’atteindre la Palestine.

Mais après la guerre et la découverte de la Shoah, l’Organisation des Nations Unies sera bien obligée d’avaliser la déclaration de la « Création de l’État d’Israël » de David Ben Gourion qui ne se fera jamais d’illusion sur la possibilité d’un accord avec les Palestiniens comme le souligne sa déclaration déjà cité.

On peut considérer (et c’est ce qui apparaît tout au long des déclarations des témoins qui défilent tout au long de ce passionnant documentaire) que la vraie problématique du « conflit israélo-palestinien », c’est, en toute simplicité, le remplacement d’un peuple par un autre.

Et pour en arriver là, le gouvernement israélien actuel plonge très volontairement le pays dans une situation d’apartheid. Il suffit de regarder la fameuse série des quatre cartes de la Palestine (avant la création d’Israël, à la création d’Israël, après la guerre des six jours en 1967 et aujourd’hui) pour s’apercevoir que l’éradication pure et simple du peuple palestinien est, en fait, le but recherché.

Si on regarde bien ces quatre cartes, seules les deux premières sont légales au regard de l’O.N.U. qui a voté le 22 novembre 1967 la résolution 242 à la suite de la guerre des six jours, résolution qui exige, entre autres, le « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés au cours du récent conflit ».

Mais les États-Unis ont toujours opposé leur véto à une résolution qui serait tentée d’aller plus loin et ce n’est pas aujourd’hui (je veux dire, avec l’actuel locataire détraqué de la Maison Blanche) que ça va s’arranger.

Bien entendu, cet excellent film est très ouvertement propalestinien ce que les bonnes âmes afficionados du politiquement correct désapprouve, la bouche en cul de poule. Mais comme il est dit dans le film, les fans de Bachar El Hassad ne sont jamais invité comme contradicteur de leurs opposants. Pourquoi s’encombrer, dès lors, de l’avis des « oppresseurs » ? Il y a, du reste pas mal de Juifs dans les interviewés et ils sont tous membres de « l’Union Juive pour la Paix », organisation juive née en 1994 et farouchement opposée à l’occupation des territoires palestiniens dont le but est « une expression juive sur les conditions d’une paix juste au Proche-Orient ».

Et ce film nous rappelle avec force que, une fois de plus, un jeu d’alliances mal maîtrisé que ses artisans continuent à faire passer pour de la « réalpolitique », aboutit à une crise amorale sans fin dont le prix finira par être exorbitant pour les artisans en question.

Mais en attendant, ce sont les Palestiniens qui paient une facture qu’ils n’ont pas à payer, ces Palestiniens pour qui « Vivre, c’est déjà résister ! »

 

Un dimanche après-midi

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The Strawberry Blonde (
Un dimanche après-midi) de Raoul Walsh (1941)

(Ciné-Classics – 22/12/99)

Marié à Amy et après bien des aventures, Biff Grimes est enfin devenu dentiste. Il a mis d’autant plus de temps à devenir praticien qu’il a fait quelques années de prison. Or, ce dimanche après-midi, alors qu’il s’apprête, en bon bourgeois, à aller faire sa promenade dominicale avec sa femme, il est appelé pour soigner, de toute urgence Hugo Barnstead et il voit là une occasion de venger ses années de prison puisque c’est à cause d’Hugo qu’il les a faites.

 

Il se souvient de comment tout ça a commencé.

Ici, tout le monde fait son boulot et le fait plutôt bien : James Cagney, Olivia de Havilland, Rita Hayworth, Raoul Walsh et les autres. Mais ça reste du boulot et, même bien fait, on s’y ennuie.

samedi 15 novembre 2025

Les Chants de Mandrin

 

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Les Chants de Mandrin (2011) de Rabah Ameur-Zaïmeche

 Louis Mandrin, contrebandier dauphinois, a été condamné à mort et roué le 26 mai 1755 à Valence.

 

Ceux de sa bande se sont très vite regroupés sous le nom des « Mandrins » et ils sont poursuivis par les soldats de Louis XV. La bande dirigée par Bélissard charge Jean Sératin, un colporteur, de distribuer largement Les Chants de Mandrin, un long poème qu’ils ont fait imprimer. Un marquis aux idées très progressistes se joint à eux.

Loin de moi l’idée de vouloir fixer les règles de base d’un bon critique, que ce soit de cinéma, de littérature ou de quoi que ce soit d’autre, mais il semble que, dans ce domaine (la critique) comme dans beaucoup d’autres, la confusion tienne lieu d’éthique (et de morale, par voie de conséquence).

J’aurai donc ici l’outrecuidance de citer les sept péchés capitaux de la critique qui sont tous des « péchés de confusion ».

  1. Confondre l’œuvre présente d’un créateur avec ce qu’il a fait avant : on peut légitimement estimer qu’un artiste qui a été l’auteur d’une œuvre superbe (ou nulle) peut, ensuite, s’être fourvoyé dans une nullité (ou un chef d’œuvre).
  2. Confondre un sujet et son traitement.
  3. Confondre un personnage et son interprète.
  4. Confondre l’habileté et la roublardise.
  5. Confondre le parler vrai et le faux naturalisme.
  6. Confondre la sympathie que vous inspirent un artiste et son talent véritable.

Et enfin, le corollaire immédiat du précédent

  1. Confondre ceux qui ont la carte (phénomène hystérico-parigo-bobo-branchouillo-téléramesque) avec ceux qui ont prouvé un sérieux savoir-faire.

« L’Œuvre » (un bien grand mot pour une bien petite chose !) présente a été l’occasion pour la critique quasi-unanime de se plonger avec délice dans les péchés 1, 2, 5 et 7.

Rabah Ameur-Zaïmeche en est à son quatrième film et le premier Wesh wesh, qu’est-ce qui se passe ? a fait, semble-t-il, grand bruit et forte impression. Est-ce une raison pour qu’il soit estampillé « grand artiste qui ne se trompe jamais » à vie ?

Qui plus est, RAZ (c’est ainsi qu’on appelle en signe d’affectueuse admiration. Mais il devrait se méfier : quand on voit où en sont DSK et BHL, on est en droit de se poser des questions !) joue dans tous ses films. Peut-être est-il formidable dans ses autres films, mais ici, il s’octroie pratiquement le rôle principal (celui de Bélissard) et il est mauvais de bout en bout, comme, du reste, l’intégralité de la distribution.

Le seul comédien professionnel dont « RAZ » se soit payé les services, c’est Jacques Nolot, comédien éminemment fin et sympathique, mais qui peut devenir assez mauvais lorsqu’il n’est pas dirigé par un grand, genre André Téchiné.

La scène grotesque où il débite, en parlant, la chanson de Mandrin est un (très) long moment de (très) mauvais cinéma, mal filmé (son papa, décédé en 2010, aurait pu expliquer à Irina Lubtchansky que dans un champ/contrechamp, la lumière doit changer de côté entre le champ et le contrechamp, ce qui explique que, dans un bon découpage, un champ/contrechamp ne se fasse jamais à 180°) et où cette très belle chanson (anonyme du 18ème siècle) paraît franchement interminable, débité comme on devait le faire dans les années 70, en première année de classe de tragédie du conservatoire d’Art Dramatique de Saint Pompon-lés-Vaches.

Le pauvre Mandrin, mort sur la roue à Valence en 1755, ne méritait certainement pas cet affront post-mortem.

On se prend à penser aux superbes Camisards de René Allio en 1972 et s’il n’y avait, entre autres, le très beau Jeanne captive de Philippe Ramos, on pourrait penser que le film historique a salement régressé depuis 40 ans.

Evidemment, les critiques sont tombés à bras raccourcis sur le film de Ramos qui devrait vraiment s’arranger pour avoir la carte, lui aussi. Comme RAZ…

mardi 4 novembre 2025

La Dernière rafale


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The Street with no Name (La Dernière rafale) de William Keighley (1948)


A la suite de deux braquages, l’un dans une boite de nuit, l’autre dans une banque, braquages pendant lesquels deux personnes ont été assassinés, un suspect est arrêté. Alors que les inspecteurs du F.B.I. vérifient son alibi (qui tient), le suspect est libéré sous caution et tué peu après.

Le F.B.I. décide d’infiltrer l’organisation criminelle qui a monté les deux hold-up. L’agent infiltré s’appelle Gene Cordell.

Sous le nom de George Manly, il se fait remarquer dans une salle de boxe par le propriétaire, Alec Stiles, une petite frappe au rire étrange et qui semble craindre beaucoup les refroidissements.

Même si l’hommage appuyé de la Fox au travail du F.B.I. agace un peu ici et rappelle un peu trop l’amitié de Zanuck pour J. Edgar Hoover (cité nommément en début de film), ces deux canailles institutionnelles (« Dis-moi qui tu fréquentes… »), cette série B a tout le charme de « sa catégorie » : scénario linéaire, réalisation nerveuse et interprétation irréprochable en tête de laquelle on trouve Richard Widmark dans ce qui deviendra sa griffe après ce film, la petite gouape névrosée dont l’hystérie et les manies « compulsives » (ici, Alec Stiles est obsédé par ses voies nasales et ne se déplace jamais sans son inhalateur) font peur plus qu’elles n’agacent, tout au moins dans les films de qualité comme c’est le cas ici. Et puis surtout, il y a l’ambiance, cette ambiance qui fait toute la qualité des polars Fox de l’époque.

lundi 3 novembre 2025

La Chanson d’une nuit

 

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La Chanson d’une nuit (1932) d’Anatole Litvak


Ferraro est un ténor célèbre dont le dernier grand succès La Chanson d’une nuit est sur toutes les lèvres. Mais il est affublé d’un imprésario autoritaire et hystérique. A la première occasion, il lui fausse compagnie.

Dans le train qui l’emmène en Suisse, il rencontre Alexandre, un escroc. Il se rend avec lui dans une petite ville où la rumeur de sa présence risque de lui empoisonner la vie. Il se fait passer pour le secrétaire de Ferraro, laissant à Alexandre le rôle du ténor en vacances.

C’est alors qu’il fait la connaissance de la fille du maire du village.

Comme bien d’autres films de l’époque, celui-ci avait pour tâche de mettre en valeur le talent de comédien d’un chanteur d’opéra et de le populariser. Et comme l’écrasante majorité de ses « collègues », Jan Kiepura s’en sort plutôt mal, malgré un charme certain.

Le film s’ouvre sur un gag assez efficace : alors que le ténor commence sa chanson, une bouche en gros plan s’ouvre démesurément. Il s’agit de la bouche du patient d’un dentiste.

Jan Kiepura nous chante La Danza, Questa o quella, le brindisi de La Traviata, Che gelida manina, les classiques dans ce genre de films, et, naturellement, La Chanson d’une nuit.

Brasseur en fait, comme d’habitude, un tout petit peu trop. Les situations sont convenues et les péripéties attendues. Malgré le charme et le talent de la toute jeune Magda Schneider, on s’ennuie nettement.

dimanche 2 novembre 2025

La Stratégie de la poussette

 

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La Stratégie de la poussette (2011) de Clément Michel

Thomas rencontre Marie le jour de l’anniversaire de la jeune femme. C’est le coup de foudre.

Un an plus tard, Marie, qui veut un enfant, s’ennuie avec Thomas et elle le quitte le jour de son anniversaire.

Un an plus tard encore, Thomas pense toujours à Marie et il voudrait reprendre leur histoire. Son ami Paul essaie de le pousser à sortir, mais Thomas se morfond.

Le jour où Mélanie, une voisine de Thomas fait un malaise dans l’escalier, son bébé tombe dans les bras de Thomas qui, dés lors, est pris pour le père de l’enfant.

 Celui-ci affichait « comédie » et un gag -un seul, j’aurais dû me méfier !- m’avait amusé dans le film-annonce.

En fait, la « comédie » était une « comédie romantique », ce type de chamallow cinématographique que j’exècre et que, en général, je fuis. Et le gag qui m’avait amusé était le seul un peu drôle de cette sinistre pantalonnade.

Visiblement, mon avis ne devait pas être partagé par tous, car deux rangs derrière moi, une dame a gloussé bruyamment pendant toute la projection où j’avais eu le malheur d’atterrir.

Certes Charlotte Le Bon et Raphaël Personnaz sont jeunes et charmants, mais alors que la jeune femme n’est pas franchement la comédienne du siècle, on peut dire que Personnaz, que ce soit dans Trois mondes de Catherine Corsini ou même dans la très médiocre Princesse de Montpensier de Tavernier, nous avait habitué à mieux.

Le scénario est à la fois très mal fichu, très répétitif et sans relief ; quant à la mise en scène, elle est inexistante.

Le réalisateur est, en revanche, un peu drôle dans le rôle d’un chanteur ringard, genre Frank Michaël pour bébés.

samedi 1 novembre 2025

Chanson douce

 


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Chanson douce (2019) de Lucie Borleteau                                                                                                                                                                                                                                                

Après la naissance de son premier enfant, Myriam est restée à la maison pour l’élever, puis elle en a eu un deuxième.

Mais alors que sa progéniture grandit, elle voudrait bien reprendre son boulot d’avocate.

Son mari Paul est plus réservé, mais ils engagent une nounou, Louise.

Louise semble dévouée, très compétente et elle ne compte pas ses heures. Alors que Paul est ravi, Myriam, elle, sent qu’il y a quelque chose d’inquiétant chez cette « nounou idéale ».Chanson douce, le roman de Leïla Simoni a obtenu le prix Goncourt 2016. Et comme dans notre univers parisien, pour ne pas dire germanopratin, on lit toujours le prix Goncourt, il est sous-entendu que tout le monde (enfin, le monde qui compte !) a lu le livre en question.

Et lorsque le film de Lucie Borleteau est sorti, ce « monde qui compte » nous a vite rappelé que ce qui est la fin du film était, en fait, le début du roman et tout le monde y est allé de son « divulgachage » qui a, bien entendu, complètement ruiné le film.

Du coup, les critiques sont tombés presqu’unanimement dessus, alors que, sans être très bon, Chanson douce n’a rien de déshonorant.

Comme j’avais eu le malheur d’entendre la critique au Masque et la plume, je connaissais le final du film (« On peut le dire puisque c’est dans les premières pages du roman » dit, assez sottement, le présentateur de ladite émission).

Or, je ne crois pas que la cinéaste ait eu l’intention de montrer, à priori, son film à ceux qui « savaient » comment tout cela finissait.

Maintenant, c’est peut-être, effectivement, une drôle d’idée d’avoir joué sur le suspense d’un final qu’à priori, tout le monde connaissait.

… En revanche, le film tape assez justement sur le couple qui semble être une caricature de la boboïtude : « Louise est merveilleuse », « Louise fait presque partie de la famille ». Oui, tout est dans le « presque » !

Car lorsque Louise « se permet » de donner à la petite un yaourt périmé depuis un seul jour, Myriam la douce bohème (re)devient la terrible bourgeoise, la « patronne » qui interdit. Quant à Paul, le mari « musicien bohème », il va s’avérer n’être qu’un sinistre et médiocre petit bourgeois.

Lucie Borleteau représente parfaitement l’étouffement petit-bourgeois comme elle avait présenté parfaitement l’univers clôt d’un tanker dans Fidelio et savoir filmer une ambiance, c’est la marque d’une cinéaste qui connaît son métier.

Leïla Bekhti et Antoine Reinartz se tirent admirablement des rôles de bobos que, visiblement, Borleteau n’a pas voulu si sympathiques que ça.

Mais c’est, bien évidemment, Karin Viard qui se taille la part du lion en incarnant l’inquiétante Louise à laquelle elle parvient pourtant à nous attacher.