mercredi 17 mars 2021

Marvin ou la belle éducation

 

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Marvin ou la belle éducation (2017) d’Anne Fontaine

Marvin Bijou vit dans un village des Vosges, au sein d’une famille prolo.

Marvin est harcelé à l’école et méprisé par ses parents et son frère aîné parce que ses attitudes sont considérées comme celles d’une « gonzesse » ou d’une « tapette ».

Un peu par hasard, il intègre l’atelier-théâtre du collège et, avec le soutien de la nouvelle proviseur, il s’inscrit à la classe de théâtre du lycée d’Épinal.

C’est là qu’il rencontre Abel Pinto qui va devenir un ami et qui va l’encourager à raconter sa vie sur scène.

Marvin Bijou devient alors Martin Clément.

« Pour info, je n’ai rien à voir avec le film d’Anne Fontaine Marvin. Ni mon nom, ni le titre de mon livre n’apparaissent au générique ».

C’est ce que déclarait Édouard Louis, auteur de Pour en finir avec Eddy Bellegueule, roman autobiographique de celui dont le nom était bel et bien… Eddy Bellegueule.

Dans le film, Marvin écrit le livre Pour en finir avec Marvin Bijou. Alors si ce n’est pas une adaptation, ne serait-ce pas un plagiat ?

Mais adaptation ou plagiat, c’est un ratage.

D’abord, il y a ce montage parallèle entre le récit chronologique qui va de l’enfance à la post-adolescence de Marvin qui va de l’enfance à la post-adolescence de Marvin et l’évocation non chronologique de sa post-adolescence, avec son départ, son homosexualité assumée et le théâtre. Bien que le procédé ait été déjà utiliser et en beaucoup plus réussi, ce n’est pas vraiment là que le bât blesse.

Comme beaucoup « d’œuvres » qu’on nous inflige, ce film-ci est un ramassis de poncifs et de lieux communs avec prolos avinés (enfin, alcooliques plutôt, parce qu’ils se finissent au Pastis !) et violents, homosexuels bobos cultivés et riches, l’un plus bourgeois (Roland), les autres plus bohèmes (Abel et Pierre), mais habitant tout de même un appartement à Saint Michel, comédienne-star hyper « à l’écoute » et immédiatement admirative du héros (Isabelle Huppert), sans oublier, bien sûr, la proviseure sublime qui va faire sortir le héros de son environnement pourri (Madeleine Clément) dont Marvin reprendra le nom, comme un « deuxième baptême » ou, mieux, une deuxième naissance.

Tout cela est très bête et parfaitement ennuyeux.

Côté casting, la « star », c’est Isabelle Huppert QUI N’EST PAS PLUS Isabelle Huppert que le film n’est une adaptation du roman d’Édouard Louis. Mais elle fait quand même du Isabelle Huppert sans la moindre conviction. Charles Berling est assez grotesque dans le rôle du micheton. Quant au « merveilleux » Finnegan Oldfield, il a la présence d’une quenelle de brochet dans une cantine scolaire dans les années soixante (un de mes pires souvenirs !).

Heureusement, il y a les bons. Les parents d’abord : bien que le mauvais scénario les ait lourdement chargés, Grégory Gadebois et Catherine Salée réussissent à être émouvants. Le premier surtout est superbe dans deux des seules scènes réussies.

Vincent Macaigne est très émouvant et Catherine Mouchet est extraordinaire. India Hair pour qui je n’avais pas une estime excessive nous donne une des autres belles scènes du film. Mais la vraie révélation, c’est Jules Porier dans le rôle de Marvin enfant : plus qu’un « comédien-enfant », c’est une présence, quelqu’un qui s’impose contrairement à son avatar « adulte ».

Mis à part ces quelques bons comédiens, on peut sauver trois scènes : deux avec le père, une avec la sœur.

Avec le père, il y a le départ de Marvin en train pour Épinal. Le jeune Marvin (Jules Poirier) est dans le train, dos à la fenêtre, alors que son père est sur le quai derrière lui et le plan s’attarde jusqu’au départ du train : Marvin ne se retourne pas et son père ne le quitte pas des yeux alors que le petit garçon quitte sa vie d’enfant dans ce train qui part. Ici, les deux comédiens d’une grande sobriété sont extraordinaires.

Comme est extraordinaire, le même Grégory Gadebois dans la scène d’explications du père et du fils qui, visiblement, se parlent pour la première fois. Quel dommage que, face à lui, il n’y ait, cette fois-ci, que l’insipide Finnegan Oldfield !

C’est aussi le problème de la troisième bonne scène dans laquelle India Hair (que j’avais peu apprécié dans Crash Test Aglaé) est au moins aussi bonne que son « père », mais, hélas pour elle, face au même Oldfield.

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