samedi 15 mai 2021

J. Edgar

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J. Edgar (2011) de Clint Eastwood

 John Edgar Hoover rentre au service du procureur général Alexander Mitchell Palmer en 1919. Ce procureur, bien que démocrate, est l’inventeur de la notion de « Péril rouge ».

Jusqu’à sa mort en 1972, celui qui se fait rapidement appeler J. Edgar Hoover parce que sa mère l’a toujours appelé Edgar, cultivera son anticommunisme qui culminera entre 1945 et 1960 (pour les raisons qu’on peut aisément imaginer !).

Il deviendra le premier patron du « Federal Bureau of Investigation » (F.B.I.) dont il dirigera les destinées de 1924 à 1972.

Pour rester en place face à des présidents qui lui seront parfois franchement hostiles (Franklin D. Roosevelt, John F. Kennedy), il accumulera les surveillances frauduleuses et les dossiers compromettants, alors que lui-même « semble » homosexuel dans une époque où c’est difficilement tolérable pour un responsable du FBI.

J. Edgar Hoover régna sans partage pendant 48 ans sur le F.B.I., c'est-à-dire depuis la création dudit Bureau en 1924 jusqu’au décès du susdit Hoover en 1972.

Dans l’imaginaire collectif, il représente ce que les Etats-Unis ont pu créer de plus monstrueux, tous ces paranoïaques dangereux, ces détraqués qui, à l’instar d’un Hitler ou d’un Staline (tiens, tiens !) ont eu toute latitude pour éliminer non seulement leurs ennemis, mais souvent, leurs simples contradicteurs : pendant l’époque (bénie pour eux) du règne du sinistrement historique (et hystérique) McCarthy, il leur suffisait de prétendre qu’un tel était « communiste » pour l’éliminer.

Homosexuel homophobe, Hoover n’était pas, à l’époque ce qui existait de pire : il y avait le bras droit de McCarthy, Roy Cohn, avocat (pourri) de la mafia, qui était également homosexuel homophobe, mais aussi juif antisémite et très fier d’être celui « grâce à qui Ethel Rosenberg avait été condamnée à mort et exécutée ».

Disons tout de suite que, pour immonde qu’il eût pu être, Hoover était un tout petit peu moins pire. Les deux hommes s’entendaient d’ailleurs fort bien puisqu’ils auraient participé à des « parties fines entre hommes » et la mafia aurait possédé des documents pour le corroborer, ce qui expliquerait la position officielle du F.B.I. (qui était celle de Hoover) vis-à-vis de l’organisation criminelle, du genre « Mafia ? Connais pas ! ».

Ceux qui lançaient des accusations ou faisaient courir des bruits à ce sujet étaient naturellement poursuivis par celui que d’aucuns avaient surnommés « le plus grand salaud d’Amérique ».

Clint Eastwood, qu’on peut difficilement soupçonner de gauchisme, réalise un biopic (forcément) à charge de ce sinistre petit bonhomme.

Et en 135 minutes, Eastwood brosse le portrait d’un malade mental, mais qu’il ne peut s’empêcher de défendre. Tout d’abord, il le fait interpréter par le très charismatique Leonardo Di Caprio qui s’approprie le personnage de façon positivement stupéfiante. Ensuite, l’homosexualité d’Hoover et sa vie de « couple » avec son « adjoint » Clyde Tolson sont présentées de façon très ambiguë que lui ont reproché les associations gays états-uniennes.

Outre ce reproche auquel je souscris, je pense qu’il y a pire. J. Edgar Hoover a été le bras armé des séides de McCarthy et la période dans le film est à peine esquissée, comme est à peine esquissée la haine viscérale que Hoover éprouvait pour certains de ses patrons comme John F. Kennedy et son frère Robert (ministre de la justice et, à ce titre, supérieur hiérarchique de Hoover), Franklin D. Roosevelt et son épouse Eléonore. Certes, cette dernière est un tout petit peu plus évoquée, notamment à propos d’une relation homosexuelle qu’elle aurait eu avec une journaliste. Tout tourne autour d’une lettre de la journaliste en question à la « Première Dame », lettre que, dans le film, J. Edgar a toujours gardé par devers lui pour s’en servir, mais également parce que son contenu sert de « référence » à Eastwood pour évoquer l’amour de Hoover pour Tolson. L’évocation de cette lettre en final du film est une très belle idée de scénarios. Il est un peu dommage que le reste du film n’ait pas été du même tonneau.

Reste un écrit très (trop) bien maîtrisé et une interprétation superbe de Di Caprio et des deux dames qui l’entourent : sa mère (la grande Judie Dench) et sa secrétaire (la sublime Naomie Watts). Arnie Hammer est, quant à lui, très en-deça des trois autres et dans le rôle de Tolson « vieux », le pauvre a été affublé d’un grotesque maquillage qui le fait ressembler à un zombie !

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