La Vérité (2019) de Kore-eda Hirokazu
Fabienne est une star de cinéma. Elle vient de faire paraître ses mémoires.
Sa fille Lumir arrive de New York avec son mari Hank et leur fille et toute la famille s’installe dans la maison de Fabienne dans le 14ème arrondissement de Paris.
Fabienne est en train de tourner un film d’anticipation dans lequel elle joue la fille d’une femme qui n’a pas vieilli et qui, de ce fait, semble avoir l’âge de la fille de sa propre fille.
Catherine Deneuve, surnommée souvent (et à juste titre !) « La Grande Catherine », est notre star nationale.
Sous la direction de Kore-eda Hirokazu, réalisateur prestigieux et « palmé » (à Cannes), elle joue son propre rôle, celui d’une star qui vient de faire paraître ses mémoires (ce que la grande Catherine a fait en 2004 dans À l’ombre de moi-même).
L’œuvre de Hirokazu, réalisateur qui alterne documentaires et œuvres de fiction, tourne toujours autour des thèmes de la famille (Une affaire de famille qui lui valut la Palme d’or en 2018) et de la filiation (Tel père, tel fils en 2013).
Il va donc ici « mixer » deux thèmes, la famille et le vedettariat, en une recette qui aurait pu tourner à la catastrophe, mais qu’il réussit avec un bonheur rare.
Tout d’abord, il évite le clin d’œil épais : c’est Juliette Binoche qui incarne la fille de la star et non Chiara Mastroianni. Ensuite, il installe un jeu de miroir : Fabienne joue le rôle de la fille de Manon, une femme qui ne peut pas vieillir, incarnée donc par une actrice qui a l’âge de la fille de Fabienne.
Et la caméra de Hirokazu n’est jamais celle du film qui se tourne dans le film, elle est toujours à 180° : nous sommes sur un tournage, pas dans une histoire, même si Lumir est troublée par les rapports professionnels que sa mère entretient avec sa « mère de fiction » (mais en âge « apparent » semble être sa fille), rapports que le réalisateur japonais fixe comme, finalement, assez inexistants en réalité.
Le métier de star qui phagocyte, non seulement la star elle-même, mais ses enfants, surtout lorsqu’il s’agit d’une fille, ça a donné quelques films dont certains excellents en tête desquels l’incontournable Sonate d’automne d’Igmar Bergman.
Mais Bergman avait fait de son œuvre un tête-à-tête, une sorte de huis-clos théâtral (comme la plupart de ses films), alors que Hirokazu multiplie les personnages et, par voie de conséquence, les mouvements de caméra dans une mise en scène ample et « aérée ».
Bien sûr, La Vérité (titre homonyme d’un film de Clouzot qui fit d’une autre « star » une grande comédienne, Brigitte Bardot à laquelle il est fait ici une allusion vacharde dont on ne sait si elle est du réalisateur-scénariste ou de Deneuve elle-même) n’est pas LA vérité, mais UNE vérité, celle que Fabienne raconte et celle qu’elle SE raconte.
Dans le film de Bergman, il n’y avait, en dehors de rôles épisodiques, que Liv Ullmann et Ingrid Bergman.
Ici, en dehors de Catherine Deneuve et Juliette Binoche, il y a Ludivine Sagnier, Ethan Hawke et Christian Crahay ont des rôles réels et existants, sans oublier deux excellents acteurs qu’on n’avait pas vu depuis longtemps : Alain Libolt et Roger Van Hool qui ne fait qu’une brève apparition.
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