samedi 8 mai 2021

Snowpiercer, le transperceneige

 

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Snowpiercer (Snowpiercer, le transperceneige) de Bong Joon-ho (2013)

 Suite aux différents tripatouillages que les industriels ont fait subir aux éléments et dans la crainte d’un réchauffement de la planète, la terre a subi en 2013 une subite glaciation.

Dix-huit ans plus tard, la terre n’est plus vivable et les survivants sont condamnés à vivre dans un très long train qui ne s’arrête jamais.

En tête, il y a l’élite, ceux qui commandent, ceux qui sont censés savoir, ceux qui vivent dans le luxe.

En queue de train, il y a la plèbe qui vit dans des wagons délabrés dans des conditions dignes d’un bagne ou d’un camp de concentration.

Mais la révolte gronde et Curtis va, avec l’aide du vieux sage Gilliam, tenter un coup de force qui inverserait les rôles.

Qu’est-ce qui fait que l’anticommunisme est aussi lié aux Etats-Unis ? N’est-ce pas parce qu’ils estiment qu’ils ont inventé la seule vraie société égalitaire, celle du « struggle for life », celle où tout citoyen peut aspirer à la réussite ? Enfin… ! Tout citoyen « normal », ou se rapprochant le plus possible d’une certaine « normalité », la normalité « wasp » (White Anglo-Saxon Protestant).

Du coup, leur vision cauchemardesque d’un futur abominable passe par le fantasme d’une société inégalitaire où une certaine notion de « race », selon l’environnement socio-culturel, est très prégnante. Et il est assez cocasse de voir les Américains se réapproprier la lutte des classes.

Ici, le film est franco-américano-coréen, mais il a toutes les caractéristiques du blockbuster hollywoodien.

Les wagons de queue de l’interminable et abominable train nous évoquent un univers concentrationnaire : un sous-prolétariat crasseux et exclusivement nourri de curieux « lingot de réglisse » (qui vont s’avérer être fabriqués à base de vermine broyée et cuite). Une étrange armée les surveille et vient régulièrement les compter.

Le train tourne tout autour de la terre sans s’arrêter depuis 18 ans et ceux qui ont connu « le monde d’avant » commencent à oublier « à quoi ressemblait un steak ».

Naturellement, il faut une révolution pour bousculer tout ça et cette révolution sera organisée par Curtis, un jeune homme guidé par un vieux sage, Gilliam et aidé par Namgoong Minsoo, ancien spécialiste de la sécurité et de Yona, la fille de celui-ci. Les cerveaux du père et de la fille ont été presque complètement « grillés » par la consommation excessive de drogue et il sera très difficile de les faire sortir de leur torpeur.

Pour mener cette révolution, il faut « remonter le train » vers la tête où végète des classes de plus en plus privilégiées jusqu’au wagon de tête où vit Wilford, celui qui a « inventé » le train.

Or le film est constamment inventif, ne va jamais là où on l’attend. Alors qu’une véritable armée tente de stopper les « révolutionnaires », c’est en réalité un trio de harpies qui va causer le plus de dommages : une institutrice d’apparence gourdasse et inoffensive qui va s’avérer être une tueuse implacable, une jeune femme qui vient opérer des « sélections » inquiétantes dans les wagons de queue et sert à la fois de secrétaire et de garde du corps au « patron » Wilford et surtout, Mason, à la fois « chef de police » et « idéologue », prête à trahir n’importe qui et à n’importe quel prix, ce qui nous vaut un fabuleux numéro de la grande Tilda Swinton.

Le reste de la distribution est impeccable, sans plus (ce qui est déjà pas mal) : on y voit John Hurt dans une de ses dernières prestation.

Bong Joon-ho réalise ici un film d’action d’une très grande intelligence où on retrouve la finesse du réalisateur de l’excellent Mother dans un genre pourtant aux antipodes de ce grand drame psychologique.

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