Alone in Berlin (Seul dans
Berlin)
de Vincent Perez (2016)
Le 25 juin 1940, la victoire
fulgurante de la Wehrmacht sur l’armée française est fêtée à Berlin. Les
Berlinois encensent le Führer et le Reich et la liesse est à son comble.
Les Quangel, un couple berlinois, eux, ne sont pas à
la fête. Car de cette campagne de France, Hans, leur fils unique, n’est pas
revenu. Et le couple au sein de l’immeuble qu’ils habitent, sait bien que le
« Grand Reich de mille ans » n’est pas une bénédiction pour tout le
monde, comme pour le juge Fromm, mis à la retraite ou leur autre voisine Frau
Rosenthal qui est juive et dont le mari a été arrêté.
Otto Quangel achète des cartes postales et écrit
« en caractères bâtons » des messages antinazis qu’il va ensuite
déposer dans différents endroits publics de la capitale allemande.
Anna, sa femme, ne tardera pas à découvrir ce que fait son mari et à
l’aider.
Le roman Jeder für sich Allein
(« Chacun meurt seul ») est sorti en Allemagne en 1947, l’année
même de la mort de son auteur Hans Fallada.
Le livre raconte la vie d’un
immeuble berlinois entre 1940 et 1943 et analyse les rapports de voisinage
entre un voyou collabo, une famille de nazis convaincus, un juge retraité qui
ne s’est jamais remis de la mort de sa fille, une ancienne commerçante juive
qui attend désespérément le retour de son mari, arrêté par les SS pour « détention de biens à l’étranger »
et un couple Otto et Anna Quanzel, respectivement ouvrier-imprimeur et femme au
foyer qui viennent d’apprendre la mort de leur fils unique pendant la campagne
de France.
Ce sont les personnages
centraux du livre, inspirés par les personnes bien réelles d’Otto et Élise
Hampel qui ont effectivement déposé des cartes postales partout dans Berlin,
dénonçant le régime nazi, ont été arrêtés, jugés, condamnés et décapités.
Une première adaptation du
livre est réalisée par Alfred Vohrer en 1976 avec Hidegard Knef et Carl Raddatz.
N’ayant pas vu le film, semble-t-il, bien oublié, il m’est impossible d’établir
une comparaison avec le film de Perez.
En revanche, on peut comparer
le roman Seul dans Berlin (ressorti
en France il y a quelques mois) avec ledit film. Le roman d’Hans Fallada était
considéré par Primo Levi comme « l’un
des plus beaux livres sur la résistance allemande antinazie » dont le
sujet était la peur et la lâcheté : toutes les cartes déposées par les
Quanzel ont été pieusement et servilement rapportées à la Gestapo et le seul
authentique lecteur de ces cartes sera le commissaire Escherich qui, bien que
« converti » grâce aux cartes (et ce sera le seul, puisque le seul à
les avoir lues !), va livrer le couple aux bourreaux avant de se suicider
lui-même.
La dernière séquence du film
de Perez nous montre ce suicide précédé du vol des cartes postales qu’Escherich
balance par la fenêtre pour les rendre publiques.
Malheureusement, c’est
peut-être la seule séquence réussie du film et elle arrive bien tard.
Le film est tourné en anglais
avec, pour certains des comédiens, un fort accent allemand, ce qui est
inévitable pour une co-production franco-germano-britannique.
Pour qu’on comprenne bien que
nous sommes dans les années de plomb, l’ambiance berlinoise est grisailleuse et
sinistre, mais tout est répétitif et inintéressant.
Curieusement, devant ce Berlin
nazi de carton-pâte, le film auquel j’ai pensé, c’est l’admirable Julia, mais Perez n’a rien à voir avec
Zinnemann, d’abord parce que Zinnemann était né à Vienne et avait vécu à Berlin
avant de s’expatrier aux Etats-Unis en 1929, ensuite parce que c’était un grand
cinéaste, ce qu’on ne sent pas forcément chez Perez…
Emma Thomson et Brendan
Gleeson, malgré leurs talents respectifs, ne sont crédibles à aucun moment.
Daniel Brühl, qui s’améliore avec le temps, est tout juste passable. Seul
Mikael Persbrandt dans un rôle de SS sadique, stupide et ignoble à souhait,
tire son épingle du jeu ainsi que Monique Chaumette qu’on n’avait pas vue
depuis bien longtemps et qui nous donne ici une interprétation sensible du
personnage touchant de Frau Rosenthal, la pauvre vieille juive.
Mais à part ces deux-là, il
faut bien avouer que le film est un ratage[1].
[1] C’est, du reste ce que va
considérer l’ensemble de la critique, mais deux ans plus tard, la même critique
va se pâmer devant ce que JE considère comme bien pire, Une vie cachée du cureton américon
Malick.
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