lundi 7 septembre 2020

Aferim !


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Aferim ! (2015) de Radu Jude
En 1835, dans un village de la campagne roumaine, Costandin, un brigadier de gendarmerie et son fils Yonita, qui est aussi son adjoint, sont chargés par un boyard de retrouver un esclave gitan qui s’est enfui après avoir couché avec l’épouse du boyard.
Chemin faisant, Costandin utilise tout ce qu’il voit pour enseigner à son fils le sens de la vie.
Il retrouve le fugitif et se charge de le ramener à son « maître », en sachant très bien que celui-ci va le tuer lentement, avec sadisme.
En Perse et, par voie de conséquence, en Albanais, « Aferim », ça veut dire bravo. Le titre du film est donc ici totalement cynique. Costandin n’est qu’un pauvre mercenaire pas très doué qui sert de valet à des boyards sadiques et mesquins comme cet immonde Iordache, le seigneur pour lequel Costandin ramènera le pauvre Tzigane à l’abattoir.
Mais il va passer tout le film à « inculquer les grands principes des vertus humaines » à son fils, pas si niais que ça, qui va le mettre en difficulté en lui posant des questions pleines de bon sens.
Le film est en noir et blanc et il est vrai qu’il est difficile de faire moche en noir et blanc. C’est d’une beauté formelle stupéfiante et la réalisation mélange habilement le lyrique et le sordide. On pense par moments (en très mineur tout de même !) au magnifique Manuscrit trouvé à Saragosse de Wojciech J. Has.
Bien sûr, l’histoire est beaucoup moins intéressante et le scénario n’a pas la sublime habileté du film de Has (et du roman de Potocki).
De plus, il est quand même très bavard et certaines comédiennes ont des voix perçantes assez insupportables.
Mais il aborde avec originalité des problèmes qui, eux, sont plus quotidiens. L’extrême mépris des humains entre eux, les Tziganes considérés comme des sous-hommes, les esclaves qui servent de puching ball, les Boyards qui ont droit de vie et de mort sur tout le monde, y compris sur les représentants de la force publique, etc…
Et tout cela dans une campagne verdoyante, mais en noir et blanc, dans la première moitié du 19ème siècle
On peut donc lui reprocher d’être bavard et un petit peu trop long.
Mais c’est une œuvre qui vaut le détour.

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