vendredi 25 septembre 2020

L’Affaire SK1

 

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L’Affaire SK1 (2013) de Frédéric Tellier

Frank Magne, jeune inspecteur de police, arrive dans son nouveau service qui s’occupe d’affaires criminelles au « 36 », c’est-à-dire 36 quai des Orfèvres, le siège bien connu de la Police Judiciaire parisienne. Nous sommes en 1991 et Frank doit s’occuper du meurtre sauvage d’une jeune fille Pascal Escarfail.

D’autres femmes sont agressées et égorgées selon le même processus.

Magne commence alors à soupçonner un phénomène de tueur en série et cette affaire l’obsède.

Le 19 mars 2001, commence le procès de Guy Georges, défendu par Alex Ursulet et Frédérique Pons qui commencent à plaider la non culpabilité pour les multiples viols et les sept meurtres.

« La Bête de la Bastille », « Le tueur de l’Est parisien » sont les deux surnoms dont on a affublé Guy Georges avant de connaître son identité. « SK1 » était celui du dossier le concernant à la P.J., autrement surnommé (encore un surnom !) le « 36 ».

Le film se déroule sur deux époques distinctes : la première, c’est 1994, l’année où la police (Frank Magne) fait le rapprochement entre le meurtre de Pascale Escarfail (le 24 janvier 1991) et celui de Catherine Rochet (le 7 janvier 1994).

La seconde époque, c’est mars-avril 2001, les deux mois durant lesquels eut lieu le procès de Guy Georges.

Le film, du reste, joue sur les dualités : les deux époques, donc, mais aussi sur l’opposition entre polar et drame psychologique, ou tout au moins, étude sur la psychologie d’un monstre, ce qui, après tout, fait également partie de l’enquête policière.

Car le film a l’ambition visible de jouer sur les deux tableaux. Qui trop embrasse mal étreint : l’étude psychologique aurait pu nuire à la nécessité d’un certain rythme dans l’enquête policière et cette enquête compromettait la profondeur de l’étude psychologique.

Or, rien n’est à reprocher au rythme de l’enquête policière et Frédéric Tellier, du coup, nous donne un polar, certes excellent, mais un peu trop convenu, trop « déjà vu » avec rivalité des services de police, ambiance très « 36 » (entendez quai des orfèvres, bien sûr !) avec litres de café, sandwiches, unités en planque toute la nuit, bref, les trucs qu’on a vu des milliers de fois dans toutes les séries télé, des plus sublimes aux plus médiocres.

Mais le film, lui, n’est pas médiocre et il est excellent précisément dans « l’autopsie d’un monstre ».

Le côté standardisé n’est donc pas un défaut majeur et c’est tout juste un peu agaçant.

Autre défaut (puisqu’on en est aux défauts), le casting inégal : on va de l’excellence, avec Nathalie Baye (l’avocate Frédérique Pons), Olivier Gourmet (Bougon), Michel Vuillermoz (Carbonnel), Thierry Neuvic (Jansen) au très médiocre (William Nadylam) en passant par le « passable » (avec Marianne Denicourt, dans le rôle, il est vrai très bref de la cheffe de la « crim ») et le « variable » avec le personnage principal interprété de façon inégale par Raphaël Personnaz. Mais il y a tout de même celui qui sort du lot, le superbe Adama Niane, beaucoup vu à la télévision, mais peu au cinéma (une fois de plus, la télévision est à l’origine de la révélation), dans le rôle passionnant, mais exigeant du « monstre » Guy Georges.

Pour le reste, tout est bon : le rythme, comme je l’ai dit, la réalisation au cordeau et le contraste entre les scènes qui se succèdent, les unes très convenues et prévisibles, les autres beaucoup plus fines.

Le film suit bien les aléas de l’enquête et passe par-dessus le handicap du polar « dont on connaît la fin ». Frédéric Tellier, David Oelhoffen et Patricia Tourancheau, les scénaristes font mention des carences de la police et de la justice, mais sans insister lourdement et c’est heureux : la presse l’a suffisamment fait à l’époque.

Et notre triste époque qui fait la part belle aux populismes sécuritaires de tout poils n’a pas besoin qu’on lui rappelle que nos institutions démocratiques ont aussi leurs carences.

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