samedi 21 mai 2022

La Princesse de Montpensier

 

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La Princesse de Montpensier (2010) de Bertrand Tavernier

 En 1562, les guerres de religion qui semblaient s’essouffler repartent de plus belle. Le comte de Chabannes, après avoir tué une femme enceinte, dépose les armes.

Mais il ne peut retourner à la cour, car il fut, un temps, dans le parti réformé contre la famille royale. Il retrouve par hasard le jeune prince de Montpensier qui avait été son élève et qui le prend sous sa protection.

Le duc de Montpensier, père du prince, parvient à circonvenir le marquis de Mézières pour que Marie de Mézières épouse le prince de Montpensier.

Or, Marie de Mézières était promise à Mayenne, le jeune frère d’Henri de Guise, ami d’enfance de Marie, amoureux et aimé d’elle depuis toujours.

Cependant, elle épouse, contre son gré, le prince de Montpensier.

Eh oui, ponctuellement, Tavernier nous revient avec ses gros sabots et il s’attaque avec la finesse d’un tyrannosaure devant une armoire de bibelots.

Et pour (finement) nous montrer qu’il n’aime pas le petit voyou de l’Elysée, il décide de s’attaquer, pour la défendre, bien sûr (la pauvre !) à Madame de La Fayette dont l’œuvre fut récemment vilipendé par l’inculte et populiste actuel locataire du palais présidentiel. Mais pour le coup, je ne suis pas sûr que Madame de La Fayette se remette de cette défense-là.

Passons sur ce qu’il y a de moins pire (et encore !), l’interprétation. Si Lambert Wilson et Raphaël Personnaz sont parfaits, Mélanie Thierry et Gaspard Ulliel avec leurs moues boudeuses (on dirait qu’ils se sont donné le mot !) laissent déjà un peu plus sceptique. Dans les rôles secondaires, ça se gâte : Michel Vuillermoz (le duc de Montpensier) joue parfaitement faux et Philippe Magnan (le marquis de Mézières, père de la princesse) a, comme à son habitude, une façon de jouer très désabusée qui laisse penser qu’il s’ennuie (presqu’autant que nous…) et qui, à vrai dire, commence à lasser. En revanche, Florence Thomassin (la marquise de Mézières) et Judith Chemla (Catherine de Guise) sont excellentes dans leurs personnages. Mais le plus catastrophique de cette distribution, c’est Grégoire Leprince-Ringuet : BCBG (beau cul, belle gueule) certes, mais le pauvre garçon joue comme un sabot, ce qui est gênant pour le rôle du prince de Montpensier, rôle important et « rôle à texte », ce qui ne convient justement pas à quelqu’un qui annone. Voilà pour la distribution.

Le pire, ce n’est pas le scénario poussif, lourd et répétitif, ni les dialogues de Jean Cosmos voulant jouer le mélange 16ème et 21ème siècle, ce qui est la catastrophe de la quasi-totalité des films français à costumes. Non, le pire, c’est la photographie.

Bruno de Keyser, directeur de la photographie à qui on a souvent reproché son côté excessivement esthétisant, a dû décider ici de faire du crade : des plans de coupe semblent sortir d’une vidéo des années 80 et l’assistant caméraman devait sans doute détester Mélanie Thierry : tous les plans de la « Princesse » sont flous ! Il n’y a d’ailleurs pas que cela : lorsque deux personnages sont dans le cadre (le film est en scope) à des niveaux différents, le « pointeur » ne se donne même pas la peine de rattraper le point lorsque la parole passe d’un personnage à l’autre.

Rien à dire de la partition de Philippe Sarde qui, sans être sublime, n’est pas gênante.

Mais il est tout de même curieux que ce film, faisant partie de la sélection officielle française au festival de Cannes 2010 et qui y fut accueilli dans un silence critique poli, pudique et assourdissant, fasse aujourd’hui l’objet de papiers dithyrambiques dont on peut légitimement se demander si, par hasard, ils n’auraient pas été prédigérés depuis six mois, le temps de se dire : « Mais qu’est-ce qu’on peut dire de bien de ça… ? »

Tavernier aurait-il des amis dans la presse ?

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