Ace in the Hole (Le Gouffre aux chimères) de Billy Wilder (1951)
Chuck Tatum se fait engager par
le journal d’Albuquerque dirigé par le très honnête Jacob Q. Boot.
Journaliste marron (comme on parle d’avocat marron)
sans le moindre scrupule, il s’est fait renvoyé d’un nombre incalculable de
journaux et il est unanimement détesté dans la profession. Mais il rapporte
beaucoup d’argent.
Lorsqu’il apprend que la galerie d’une mine du
Nouveau Mexique s’est écroulé et qu’un mineur, Leo Minosa, est resté coincé
en-dessous, il se fait envoyer par le journal pour couvrir l’évènement.
Il va faire en sorte de transformer ce fait divers en attraction dont
il sera le seul bénéficiaire et va réussir à faire choisir la méthode de
sauvetage la plus longue qui lui permettra de faire durer sa gloire le plus
longtemps possible alors que, pour Minosa, les chances de survie s’amenuisent
d’heure en heure.
Réalisé entre le célébrissime
Boulevard du Crépuscule et Stalag 17, Le Gouffre aux chimères ne fait pas partie des œuvres les plus
prestigieuses du réalisateur de Fedora et
de Certains l’aiment chaud.
Réputé pour
sa causticité qui peut très facilement virer au cynisme le plus noir, Billy
Wilder aurait dû être à l’aise avec ce sujet, auquel nous aurions dû, nous,
spectateurs contemporains, d’autant plus adhérer que les faits dénoncés dans ce
film de 1951 sont quasiment notre pain quotidien plus de soixante ans plus
tard.
Mais très
curieusement, on met beaucoup de temps à se rallier à cette histoire qui, dans
sa partie centrale, semble beaucoup patiner.
Heureusement,
le film trouve son rythme de croisière dans la deuxième partie, mais c’est le
revirement de Tatum et ses états d’âme qui font franchement
« fabriqués » auxquels on assiste sans trop y croire.
Kirk Douglas,
très bien entouré, est parfait, comme d’habitude. On citera aussi Ray Teal (le
shérif), Porter Hall (le patron intègre du journal d’Albuquerque) et Bob Arthur
(Herbie) également excellents. Mais la vraie découverte, c’est Jan Sterling, une
sorte de double de la Barbara Stanwyck d’Assurance
sur la mort dont elle a l’animalité, mais dont elle n’aura pas la
prestigieuse carrière. On la verra dans pas mal de séries télé jusque dans les
années 80.
Le Gouffre aux chimères est un film sur les dérives
de la médiatisation, mais s’il ne parvient pas à nous passionner, c’est
peut-être parce que nous avons vu bien pire depuis 1951 et que nous voyons bien
pire tous les jours depuis quelques années.
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