vendredi 10 juillet 2020

La Femme au tableau


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Woman in Gold (La Femme au tableau) de Simon Curtis (2015)
Entre 1904 et 1907, le peintre Gustav Klimt peint le portrait d’Adèle Bloch-Bauer, à la demande de son mari Ferdinand Bloch-Bauer.
En 1998, Maria Altmann, la nièce d’Adèle Bloch-Bauer, consulte Randol Schoenberg, un jeune avocat, petit-fils d’Arnold Schoenberg qui était un ami de son défunt mari.
En 1938, lors de l’Anschluss, les nazis ont saisi tous les biens de la famille Bloch-Bauer dont plusieurs tableaux de Klimt.
Maria Altmann attaque par l’entremise de Randy Schoenberg l’état autrichien et exige la restitution des tableaux de Klimt.
Depuis 2006, le portrait d’Adèle Bloch-Bauer, la toile la plus célèbre de Gustav Klimt est aux Etats-Unis, propriété de Maria Altmann, après huit années de procès opposant la vieille dame au gouvernement autrichien.
L’affaire des toiles de Klimt suscite encore des jugements passionnés pas toujours très rationnels (mais c’est le propre des jugements passionnés !).
Deux pays, deux continents, deux histoires : entre l’Autriche et les Etats-Unis, le malentendu est complet.
Lorsque l’Europe a été libérée du nazisme, l’Allemagne, pays agresseur et fauteur de la guerre qui se terminait, a été, tout naturellement, occupée.
Et, tout au moins dans la zone occidentale occupée par les Anglo-Américains, les forces d’occupation ont commencé par mener une bataille idéologique, la dénazification. Et cette bataille a été gagnée, puisqu’elle a fait de l’Allemagne l’un des pays les plus attachés à la démocratie.
Malheureusement, les alliés ont invraisemblablement rangée l’Autriche dans le rang des « victimes du nazisme », négligeant au passage l’enthousiasme des Autrichiens pour l’Anschluss (le plébiscite organisé par les nazis après l’annexion recueillait un résultat de 99,75% de votes favorables en Autriche, alors qu’il n’était « que » de 99,08% en Allemagne) et le fait, tout simple, qu’Adolf Hitler était autrichien.
Et on a su depuis que l’idéologie nauséabonde a plus facilement cours au pays de la valse que chez Bismarck, justement depuis la fin de la guerre et la dénazification.
Au bout du compte, beaucoup d’Autrichiens s’estimaient bien victimes, mais des Anglo-Américains.
Aussi, voir une Américaine, juive (l’Autriche a toujours été beaucoup plus « traditionnellement » antisémite que l’Allemagne), venir réclamer un « bien national » dont le portrait d’Adèle-Bauer, considéré comme « La Joconde viennoise », c’est pour les Autrichiens absolument inconcevable. Et l’Autriche ne cèdera que très difficilement, refusant de proposer le moindre arrangement amiable.
De l’autre côté, il y a les Américains, forts de leur puissance économique et de ce qu’ils considèrent comme leur « suprématie morale ». Naturellement, pour eux, tout doit être rendu à Maria Altmann, sans la moindre discussion, sans la moindre négociation.
Le film de Curtis, interprété par la grande Helen Mirren, se veut quelque peu hagiographique au regard de Maria Altmann. Celle du film est d’une grande dignité et elle propose même de laisser les toiles à l’Autriche, sous certaines conditions. Or, il semble qu’il n’y ait jamais eu ce genre de proposition de la part de madame Altmann.
C’est une des critiques adressées au film, à dire vrai, la seule critique sur le fond. Comme souvent, on repeint tout en rose bonbon : Maria Altmann n’aurait agi qu’en hommage à sa tante Adèle et, à travers elle, à toute sa famille disparue.
Or, il ne faut pas oublier qu’il y avait beaucoup d’argent en jeu et que, au bout du compte (c’est le cas de le dire), Maria Altmann en a gagné beaucoup. Et ce tableau auquel elle était « tellement attachée », elle a bel et bien fini par le vendre  pour un prix qui n’avait rien de symbolique, 135 millions de dollars, à un collectionneur privée, Ronald Steven Lauder qui l’a mis en exposition dans sa Neue Galerie, ouverte en 2001 à New York.
Les autres reproches qu’on fait au film sont plus dans la forme.
Tout d’abord, il y a l’académisme, tant du scénario que de la réalisation.
Simon Curtis est le réalisateur de My Week with Marilyn, déjà une histoire vraie filmée sans génie excessif, mais ne méritant tout de même pas le qualificatif de médiocre que j’ai lu récemment quelque part !
Certes, la réalisation est assez plan-plan et les péripéties du scénario totalement prévisibles, y compris en ce qui concerne les flash-backs, considérés comme un peu trop nombreux chez pas mal de critiques.
Qui plus est, le film n’apporte rien à la connaissance que nous pouvons avoir sur l’époque. A ce niveau-là, Le Labyrinthe du silence de Giulio Ricciarelli, auquel on compare souvent ce film-ci, nous en apprenait beaucoup plus sur l’Allemagne d’après-guerre.
Autre problème, le choix d’Helen Mirren. Ce qu’on entend souvent c’est « J’avais l’impression de voir la reine d’Angleterre dans le rôle d’une vieille Américaine d’origine autrichienne ». A ce niveau-là, la grande comédienne britannique était beaucoup plus à son aise comme ex-agent du Mossad dans L’Affaire Rachel Singer de John Madden. Si grande que puisse être son interprétation, c’est tout de même vrai qu’elle ne cède rien de son accent british et qu’on n’y croit pas du tout.
Mais, sans oublier toutes ces réserves, le film est globalement une réussite et se laisse voir sans ennui.

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