dimanche 31 janvier 2021

Shame

 

*

Shame (2011) de Steve McQueen

Brandon est un jeune cadre dynamique new yorkais. Il a un bel appartement dans un beau quartier et un train de vie assez enviable.

Mais Brandon a un problème : il est drogué, drogué par le sexe, « sex addict » comme on dit.

De brèves rencontres en prostituées, en passant par plusieurs masturbations par jour et les sites pornos, tant au bureau que chez lui, Brandon semble ne penser qu’au sexe.

Il n’est donc qu’assez peu satisfait lorsque sa sœur Sissy débarque à New York pour s’installer chez lui.

En 1975, contraint et forcé, Federico Fellini dut, pour honorer un contrat, tourner un film sur Casanova. Mais Fellini avait un sérieux problème : après avoir lu les mémoires de Casanova, le réalisateur romain l’a immédiatement détesté, le qualifiant de « sperme froid ».

C’est très exactement à ça qu’on pense en voyant Brandon sauter d’une « passe à l’autre ».

« La Chair est triste hélas et j’ai lu tous les livres » disait Mallarmé. Ici, la chair n’est pas triste, elle est sinistre. Et le regard du cinéaste sur l’addiction de son héros est sans aménité.

Son entourage, principalement sa sœur et son patron, trouvent cette suractivité sexuelle « dégueulasse » et le disent. Et c’est probablement ce que pense le réalisateur. C’est là que le bât blesse.

Steve Mc Queen est britannique, mais son puritanisme est assez typiquement américain. Du coup, nous n’avons plus un regard « clinique » sur un cas d’addiction au sexe, mais un jugement moralisateur sur un homme que son obsession rend seul, égocentrique et malheureux. Le happy end (Brandon s’assagie et n’essaie même pas de suivre la jeune femme qui lui a fait de l’œil) permet à la morale bourgeoise de triompher : son addiction a failli lui coûter la vie de sa sœur.

Tous les critiques sont tombés en admiration devant ce monument d’ennui curaillon.

Et la virtuosité (réelle) de la mise en scène, tout comme l’excellence de l’interprétation (Carey Mulligan et le superbe Michael Fassbender dont on sent à quel point il peut être une inspiration pour le réalisateur) ne font pas décoller le film.

Le sperme froid n’est pas très inspirant.