mardi 22 juin 2021

Une poule, un train et quelques monstres

  ****

Vedo nudo (Une poule, un train et quelques monstres) de Dino Risi (1969)

La Diva Une star de cinéma conduit un blessé à l’hôpital.

Processo a Porte Chiuse (Huis-clos) Un couple de paysans a porté plainte contre un autre paysan qu’ils accusent d’avoir violé leur poule.

Ornella Un timide employé des postes entretient une relation épistolaire sous le nom d’Ornella avec un bourgeois de province. Celui-ci débarque à Rome et le jeune homme est obligé de se faire passer pour le frère d’Ornella.

Il Guardone (Le Voyeur) Par un été torride, un homme très myope guette sa voisine qui se déshabille.

Motrice Mia (Locomotive chérie) Un homme respectable et marié ne peut jouir que si un train lui passe dessus.

L’Ultima vergine (Le Monstre et la pucelle) Une jeune fille, traumatisée par les mises en garde faites à la radio à propos d’un violeur en série qui serait en liberté, prend un pauvre réparateur en téléphone pour le sadique en question.

Vedo nudo (Je vois nu) Un publicitaire dont le fonds de commerce est la publicité avec femmes nues, se met à voir toutes les femmes qu’il croise complètement nues alors que, dans le même temps, il traverse une grosse « panne » sexuelle.

Ah ! C’était vraiment le bon temps de la comédie italienne. Voici un film dont j’attendais la sortie DVD depuis des années, DVD dont cette ressortie en salle sera peut-être l’occasion (il existe bien une édition italienne, mais les DVD transalpins sont en général de médiocre qualité).

Comme tous les films à sketches, il y a le meilleur et le moins bon. Mais ici, même le moins bon reste quand même excellent.

Pour moi, le moins bon, c’est celui qui donne son titre original au film Vedo nudo. L’environnement très « femmes à poil » du publicitaire est un peu longuet, un peu daté (encore que !...) et sur un argument qui ne méritait pas un tel développement.

Juste au-dessus, je mettrais le train du titre, français cette fois : son côté « surréaliste » peut plaire, mais également agacer. Sa pauvre épouse, vient des pays du froid, Suède ou Norvège, je ne sais plus. Cette origine « ethnique » de l’épouse est importante pour deux raisons : la première est que les Italiens fantasmaient beaucoup sur les scandinaves dans ces années-là et la deuxième est la réputation desdits scandinaves dans les pays du sud de l’Europe, réputation de tolérance et d’esprit libertaire. La réussite de ce sketch vient des dialogues entre l’italien et l’épouse suédoise prête à tout pardonner, mais qui admet mal que les « maîtresses » de son mari soient des locomotives.

Le Monstre et la pucelle vaut surtout pour l’interprétation de Manfredi.

Ornella est d’une qualité un peu supérieur. La situation de base est la plus originale : le jeune homme solitaire, probablement homosexuel – mais ce n’est pas dit ! – qui correspond uniquement par lettre (donc sans danger) et qui se retrouve face à son « fiancé épistolaire » qui, lui, est venu voir ce qu’il croit être une femme, aurait pu être beaucoup plus ambigu. Je pense que quarante-deux ans plus tard, le sketch se serait conclu par une « grande scène » entre les deux hommes. Mais en 1969… !

Et nous arrivons au trio de tête : La Diva n’a pourtant pas grand-chose d’original, surtout dans les comédies italiennes à sketches. Que ce soit Alberto Sordi, blessé, pris en stop par une « divine créature » (Silvana Mangano) qui l’abandonne sur le bord de la route pour rejoindre son amant (Les Sorcières : Sens civique de Mauro Bolognini) ou le même Sordi, contraint d’abandonner, à son tour, un blessé parce qu’aucun hôpital n’en veut (Les Nouveaux monstres : Premiers soins de Monicelli, Scola et – eh oui ! – Risi), le blessé ramassé sur le bord de la route a déjà servi. Mais que le pauvre homme meurt aux urgences tout simplement parce que la beauté et le charme de sa salvatrice (temporaire) ont fait que tout le monde l’a oublié est d’un humour noir assez réjouissant.

Huis-clos est un pur chef d’œuvre et un grand numéro de Manfredi en paysan demeuré amoureux d’une poule et opposé à un couple de paysans à peu près aussi demeuré que lui qui l’accuse d’avoir violé le gallinacé en question, alors qu’il maintient, lui, que c’est la poule qui l’a provoqué !

Enfin, le meilleur, c’est Le Voyeur : concis, très court et sans dialogue, on a là-dedans tout le génie de la comédie italienne en cinq minutes, un peu comme dans le sketch La Sicilienne de Franco Rossi des Sorcières.

Tout au long des sept sketches, Manfredi cabotine avec génie et pour notre plus grand plaisir.

C’est ce « figlio di mignota » de Berlusconi qui a tué ce cinéma-là. Qu’il crève !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire