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Tower of London (La Tour de Londres) de Rowland V. Lee (1939)
Londres 1471. La dynastie des Lancaster a été évincée du trône d’Angleterre par la maison d’York, Edouard, le fils aîné, a pris la couronne en lieu et place d’Henry VI. Le vieux roi, gâteux, est relégué dans une aile de la Tour de Londres où, coiffé d’une couronne en carton, il attend, en pure perte, que son fils revienne en vainqueur prendre le trône « usurpé » par les ducs d’York.
Edouard multiplie les exécutions, poussé par son frère Richard, duc de Gloucester : celui-ci, cynique, intrigant, fourbe et belliqueux ne rêve que du trône et entend faire disparaître tout ceux qui s’interposent entre la couronne et lui : son frère Edouard, bien sûr, ses deux neveux, son frère Robert, duc de Clarence, ainsi que l’héritier des Lancaster.
Après s’être débarrassé de ce dernier lors de la bataille de Tewkesbury, Richard, aidé du sinistre Mord, à la fois espion, policier et bourreau, commence à décimer sa famille.
La guerre des Deux Roses (la rose blanche d’York et la rose rouge des Lancaster) est surtout célèbre pour avoir inspiré à Shakespeare La Tragédie de Richard III, l’une des pièces les plus célèbres et surtout l’occasion pour des monstres sacrés d’incarner un monstre tout court le fourbe et belliqueux Richard III.
Ici, le célèbre bossu est interprété par Basil Rathbone, ex-Sherlock Holmes, mais surtout Mr Murdstone, le « méchant » de David Copperfield et l’odieux Karénine. C’est aussi le fourbe, le « félon », l’ignoble dans Captain Blood, Le Roi des gueux, Le Signe de Zorro et, bien-sûr, Guy De Gisbourne, le méchant des superbes Aventures de Robin des Bois de Michael Curtiz.
Malheureusement, Rowland V. Lee n’est pas Curtiz. Ce n’est pas Shakespeare, non plus. Et le problème est qu’il aurait probablement voulu être un peu des deux.
Ce qui nous donne un film assez bavard au scénario si tordu que même le scénariste semble s’être pris les pieds dans le tapis : les personnages sont trop nombreux et les actions trop multiples pour pouvoir s’en tirer sans dommage.
L’action est pratiquement absente, si l’on excepte les deux batailles de Tewkesbury et Bosworth. La photo est plutôt belle, mais le son semble avoir souffert d’un mixage très approximatif, certaines répliques étant à peine audibles.
Mais les deux pierres d’achoppement du film restent le scénario et l’interprétation.
Miles Mander est un Henry VI gâteux à l’excès et Vincent Price un duc de Clarence veule, lâche et efféminé. Ces deux rôles appelaient effectivement les pires effets de cabotinage dont aucun ne nous est épargné. Vingt ans plus tard, Price aura plus de chance dans le remake (très supérieur) de Roger Corman dans lequel il incarnera Richard. Mais le rôle le plus insupportable reste celui de Mord, à la fois espion, chef de la police et bourreau (la compression de personnel n’est visiblement pas un problème spécifique à notre époque), personnage outrageusement cabotiné par un Boris Karloff peu inspiré, une de ses pires prestations.
Basil Rathbone en fait, lui aussi, un tout petit peu trop dans le ricanement et l’œil torve.
Seule Barbara O’Neill tire son épingle du jeu dans le rôle de la reine trahie. Les deux jeunes premiers, sous Errol Flynn et sous-Olivia de Havilland, sont sans intérêt.
On n’en finirait pas de citer les scènes ridicules et invraisemblables de ce film poussif.
Et, ultime trahison à Shakespeare, Richard III meurt sans même réclamer le moindre canasson. Une honte !
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