jeudi 23 juin 2022

Le Traître (Bellocchio)

 

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Il Traditore (Le Traître) de Marco Bellocchio (2019)

Depuis le début des années 80, c’est la guerre au sein de la « Cosa Nostra ». Tommaso Buscetta fait partie du clan des « Palermitains » qui est en guerre contre le clan de ceux de Corleone, dirigé par Toto Riina.

Tommaso Buscetta fuit au Brésil et, en 1983, il est arrêté à Brasilia et fait une tentative de suicide avant d’être extradé vers l’Italie.

A Rome, il revoit le juge Falcone qu’il avait rencontré à Brasilia. Après quelques hésitations, il décide de « se repentir » pour faire tomber Riina et les Corléonais : Riina a fait assassiner les deux fils, le frère, le gendre et le neveu de Buscetta avec la complicité de Pippo Calò, ancien Palermitain devenu Corléonais.

« Noi, siamo uomini d’onore » (« Nous, nous sommes des hommes d’honneur ») : tous les bouseux siciliens (excusez le pléonasme !) et mafieux (réexcusez le pléonasme !) n’ont que cette phrase à la bouche.

Il est évident que le cinéaste romagnole et octogénaire n’a guère de respect pour tous ces déchets qui parlent d’honneur après avoir passé leurs minables (malgré leurs revenus très conséquents) existences à tuer que ce soit directement ou indirectement en trafiquant drogues et armes.

Bellocchio est un authentique intellectuel de gauche « à l’italienne » comparable à Visconti ou Pasolini (pour ne parler que du domaine cinématographique).

Il revient ici sur le « parcours » de Buscetta, mafieux tout ce qu’il y aurait « d’ordinaire » s’il n’avait été le premier « pentito » (« repenti ») assez haut dans la hiérarchie de « la pieuvre » autrement nommé par ses membres « cosa nostra ».

Bien que Bellocchio s’attache au personnage (et nous y attache par voie de conséquence), on sent chez lui le dégoût de ce système totalement pourri qu’est le système mafieux ou plus exactement que sont LES systèmes mafieux, cosa nostra, camorra, n’dranghetta pour ne citer que les trois mafias italiennes les plus connues.

Les scènes de prétoire, Bellocchio les filme dans un curieux mélange de réalisme et de surréalisme : les journaux télévisés de l’époque, et pas seulement les italiens, les filment de la même manière, mais Bellocchio y ajoute sa touche : ces salles d’audience sont un cirque où on aurait inversé les places du public qui est dans la salle, c’est-à-dire la piste, et celles des bêtes fauves qui sont sur les côtés, enfermées dans leurs cages.

On peut regretter qu’à la place des majestueux félins on ne voit que de lamentables hyènes, des déchets de la pire espèce qu’ait pu engendrer la race (à peine) humaine.

Et c’est ça qui fait la force du film de Bellocchio : montrer avec talent tous ces malfaisants s’agiter comme des macaques dans leurs cages, tellement bêtes qu’ils « dénoncent » la « trahison » de Buscetta tout en prétendant ne rien connaître de la cosa nostra.

Le casting est à l’image de la mise en scène, rigoureux, brillant, superbe. Pier Francesco Favino l’emporte haut la main dans le rôle-« titre ».

Un grand film qui est revenu de Cannes les mains vides quand on a accordé le grand prix à une bouse que, fort heureusement, tout le monde a oublié.

On n’oubliera pas Le Traître.

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