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Un autre monde (2022) de Stéphane Brizé
Philippe Lemesle dirige une usine faisant partie d’une multinationale américaine qui lui intime l’ordre de licencier 58 personnes alors que la dernière « charrette » est relativement récente.
Claire Bonnet-Guérin, la représentante en France du patron américain, lui intime l’ordre de faire accepter de nouvelles concessions aux syndicats en leur cachant, bien entendu, les 58 licenciements à venir.
Dans le même temps, Philippe doit faire face à sa séparation d’avec sa femme Anne qui lui reproche son indisponibilité, à cause de sa boîte, vis-à-vis d’elle-même, mais surtout de leur fils Lucas, actuellement interné dans un hôpital psychiatrique.
Un autre monde est le troisième (donc dernier, à priori) volet de la trilogie que Stéphane Brizé a consacré au monde du travail, tous les trois avec Vincent Lindon comme principal protagoniste.
Dans La Loi du marché, Thierry, un chômeur ayant « appris » pendant un nombre incalculable de stages à « se vendre », se retrouvait « vigile » dans un supermarché à traquer ceux qui étaient obliger de « voler pour bouffer ».
Dans En guerre (dont le titre original prévu était… « Un autre monde » !), Laurent Amédéo est le leader syndical d’une usine « mise en faillite » par ceux qui la possède et qui va se battre contre les moulins, une bataille qu’il finira par gagner, partiellement et post-mortem (dans une scène que personne n’a oubliée !).
Ici, le réalisateur fait sauter le pas à son acteur fétiche : cette fois-ci, c’est lui qui dirige l’usine mais, une fois de plus, il est le chevalier blanc, mais surtout le Don Quichotte luttant contre UN moulin, une multinationale représenté en France par une ignoble garce qui allie fausse compassion, fausse objectivité et faux « bons sens », bref une authentique « executive » dans le sens américain du terme, mais aussi dans toute son acceptation française, y compris celle de bourreau et, au-delà, déloyale, roublarde et menteuse, définition de base du faux-jeton.
Et c’est elle (et sa « hiérarchie »), tous menteurs pathologiques qui vont reprocher à Philippe le seul mensonge qu’il a commis, contraint par les circonstances.
Marie Drucker, qu’on connaissait comme journaliste, fait dans le rôle de Claire Bonnet-Guérin des débuts remarqués (et remarquables) dans le cinéma de fiction.
Une fois de plus, Stéphane Brizé offre un grand rôle à Vincent Lindon. C’est la cinquième collaboration entre le réalisateur et le comédien.
Et avec Quelques heures de printemps, c’est le plus impressionnant.
Il se clôt sur la lettre sublime que Philippe Lemesle envoie à ses bourreaux.
Cette lettre, on aimerait l’avoir écrite !
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