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Wohin und Zurück 3 – Welcome in Vienna
(Welcome in Vienna 3 – Welcome in Vienna) d’Axel Corti (1986)
Freddy Wolf est devenu sergent dans l’armée américaine. Accompagné d’Adler qui a le même passé que Freddy mais qui, lui, est Allemand, ils avancent à travers le « Reich de mille ans » en train de s’effondrer.
En décembre 1944, ils sont en Alsace et font prisonnier un certain Treschensky que Freddy a connu : c’était le fils du concierge de son lycée à Vienne et il l’a même protégé, contre rétribution, quand les premières persécutions ont commencé, après l’Anschluss.
Lorsqu’ils arrivent à Salzbourg, le 8 mai 1945, Claudia Schütte vient en émissaire de son père le colonel Schütte qui propose ses services (il était officier nazi des services secrets) à l’armée américaine.
Au grand dégoût de Freddy, mais plus encore d’Adler qui est communiste, les Américains acceptent avec empressement les services de Schütte, au nom de la guerre qui vient de commencer, la guerre froide.
Lorsqu’ils arrivent à Vienne, Freddy revoit Claudia Schütte dont il est tombé amoureux, alors qu’Adler en se promenant dans le secteur russe a une très instructive conversation avec une femme qui semble appartenir à un service de renseignement soviétique.
« Pourquoi jusqu’à ce jour, cette histoire n’a-t-elle jamais été racontée ? Pourquoi n’a-t-on montré que les destinées d’anciens prisonniers ou d’émigrés, pleines de faux sentimentalisme ? Pourquoi ne voulait-on laisser “rentrer au pays ” que ceux qui étaient restés sur place souvent sans qu’il y ait de leur faute ? Comment se fait-il que le seul film authentique sur la ville de Vienne au lendemain de la guerre ait été tourné par un Anglais ? » s’interrogeait Axel Corti dans une lettre qu’il avait envoyée à ses collaborateurs et qui était reproduite dans le dossier de presse de la première sortie du film en France en 1986.
Les épisodes 1 et 2 étaient plutôt « diurnes ». Celui-ci est plutôt « nocturne » et, de ce fait, on pense effectivement au Troisième homme : il y a même une allusion très appuyée au film de Carol Reed lorsque Freddy découvre le trafic de pénicilline de Treschensky.
A la fin de Dieu ne croit plus en nous, Ferry, le héros précédent, se retrouvait au milieu d’une rue de Marseille, pratiquement sur le point d’être renversé par une Mercédès ou appréhendé par ses occupants (dans tous les sens du terme).
A la fin de Santa Fé, Freddy, lui, était au sommet de l’Empire State Building.
Le dernier plan de Welcome in Vienna nous montre le même Freddy prêt à tourner la page et à oublier Claudia qui, une fois de plus, l’a trahi. Freddy monte dans un camion de la Police Militaire américaine pour retourner à Salzbourg, mais il descend du même camion cent mètres plus loin : il restera à Vienne.
La trahison de ceux qui n’ont plus que ça pour survivre rappelle aussi les mensonges d’Alida Valli dans Le Troisième homme. Mais la grande différence, c’est qu’Alida Valli avait affaire avec un officier anglais, donc étranger, de l’armée victorieuse d’occupation. Freddy, lui, est Viennois, même s’il s’agit d’un « Youpin » dont Claudia doit « se débarrasser dés qu’il ne lui sera plus utile » comme lui conseille son père.
Ce qui est remarquable, c’est que le film joue sur plusieurs tableaux en multipliant les points de vue : Freddy, l’ingénu (inspiré par le scénariste Troller lui-même), Adler, nouveau blasé comme on est nouveau riche, Binder, méprisé comme Américain et suspect comme Allemand, Treschensky, magouilleur obligé de faire de la lèche à tous ces Juifs dont on lui a toujours enseigné qu’ils ne méritaient que le mépris et qui ira jusqu’à « s’encombrer » d’un cadavre de « déportée » pour faire croire qu’il ressent de la compassion, et enfin, Claudia, jolie Viennoise qui fera croire à Freddy qu’elle l’aime, mais le trahira avec Adler parce qu’elle n’a pas le choix.
Ce troisième volet joue la carte de la politique, de l’histoire. C’est le plus cynique et le plus désabusé.
Dans chacun des épisodes, c’est quelqu’un qui a connu ce que les nazis avaient créé de pire, les camps de concentration, qui nous ramènera dans ce « grand Reich » que la fuite, puis l’exil et enfin la victoire pourraient nous faire oublier : Gandhi, évadé de Dachau, madame Marmorek, libérée miraculeusement de Ravensbrück, et Stodola, rescapé de Mauthausen.
Ce qui frappe également, c’est qu’à part le héros, ou plutôt, les deux héros, avatars du jeune Georg Troller, c'est-à-dire Ferry Toller et Freddy Wolf, seul l’Américain non juif (et même antisémite) d’origine allemande, Binder, passera d’un film à l’autre, en l’occurrence du deuxième au troisième.
Car la fatalité fait que les compagnons de route des deux héros de la trilogie devront être abandonné au cours de la narration.
Ainsi finit l’histoire de Freddy : il restera à Vienne. Le petit Juif est rentré chez lui. Et puis, il faut bien donner à Claudia d’autres occasions de le trahir.
Comme toute la trilogie, Welcome in Vienna est un film lisse, sans coup de théâtre, mais qui nous montre une réalité dure et médiocre et sans Happy End. Trois films superbes et nécessaires.
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