dimanche 7 août 2022

Le Masque de Dimitrios

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The Mask of Dimitrios (Le Masque de Dimitrios) de Jean Negulesco (1944)


Lors d’une réception, le colonel Haki fait la connaissance de Cornelius Leyden, auteur hollandais de romans policiers. Il lui raconte qu’on a retrouvé le cadavre d’un certain Dimitrios Makropoulos, un assassin escroc qu’il traquait depuis des années.

Plein de sollicitude, le chef de la police va jusqu’à emmener l’écrivain à la morgue pour lui montrer le cadavre de Dimitrios. Fasciné par la personnalité hors du commun de cet être malfaisant, Leyden entreprend de faire des recherches pour écrire un livre sur lui.

Il commence par se rendre à Athènes, puis à Sofia. Et c’est dans le train qui le mène à Sofia qu’il fait la connaissance d’un certain Mr Peters qui, en fait, le suit depuis qu’il a commencé son enquête.

Eric Ambler est un prolifique auteur de romans d’espionnage et Le Masque de Dimitrios est probablement le plus connu de ses romans.

Même si on ne retrouve pas dans le film de Negulesco le charme vénéneux du livre, on est frappé par la beauté du film et surtout par la grande maîtrise de la mise en scène, une mise en scène « maniériste » (dans le bon sens du terme) entièrement au service d’une histoire plus complexe qu’il n’y paraît.

Car le sujet est, tout compte fait, assez « standard » : un être malfaisant vient de mourir et le narrateur reconstitue son histoire jusqu’à se poser cette question terrible : est-ce bien lui qui est mort ? Et l’enquête du narrateur l’amènera d’Istanbul à Athènes, d’Athènes à Sofia, de Sofia à Genève et de Genève à Paris : tout au long de son périple, il fera la connaissance d’une galerie de personnages qui ont tous été victimes de l’escroc en question.

Dans le roman, il se créé un lien très fort entre le narrateur et son sujet, lien qu’on ne sent pas assez dans le film de Negulesco. Certes, Le Masque de Dimitrios n’est ni Le Faucon maltais, ni Le Grand sommeil. On peut surtout regretter que le personnage de Dimitrios n’ait pas été traité avec suffisamment de brio pour être aussi fascinant que, par exemple, le Harry Lime du Troisième homme. Il faut dire que l’honorable Zachary Scott, spécialiste des rôles de petits maquereaux et autres gigolos, ne saurait rivaliser avec l’aura diabolique d’Orson Welles. Et pour cette histoire « standard », il eut fallu un « salaud » superbe, une crapule avec panache.

A cette (importante) réserve près, le film reste d’une très grande beauté et plein d’un mystère qu’on ne parvient à percer qu’après plusieurs visions : la scène des archives d’Athènes au cours de laquelle Sydney Greenstreet est aperçu derrière l’échelle de l’archiviste et s’en va sitôt que Peter Lorre a prononcé le nom de Makropoulos est absolument superbe, de même que la servilité du personnage de petit fonctionnaire incarné par George Tobias qui, par déférence, retire le gant de sa main gauche pour saluer le personnage important qu’on lui présente… de la main droite.

L’interprétation est à la hauteur de la mise en scène : Peter Lorre (Leyden) et Sydney Greenstreet (Peters) se retrouvent trois ans après Le Faucon maltais, Greenstreet dans un rôle très proche et Lorre dans un rôle très éloigné. Les seconds rôles sont superbes, en tête desquels l’excellent George Tobias. Quelques réserves cependant sur l’emphatique Victor Francen, un peu moins poseur que dans les productions françaises d’avant-guerre. Restent les réserves exprimées sur Zachary Scott, un Dimitrios sans beaucoup de charisme.

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