lundi 31 août 2020

Priscilla, folle du desert


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The Adventures of Priscilla, Queen of the Desert (Priscilla, folle du desert) (1994)
A la suite d’un appel de son ex-épouse, Tick doit quitter Sidney pour Alice Springs. Pour payer son voyage, Tick, qui fait un numéro de travesti sous le nom de Mitzi, décide d’emmener avec lui son partenaire habituel Adam (Felicia à la scène) et Bernadette, un transsexuel, pour que le trio puisse se produire tout le long de la route et à Alice Springs.

Pour aller jusque-là, Felicia leur trouve un autocar qui sera aménagé en camping-car de luxe et qu’elle baptise « Priscilla, folle du désert ».
 The Adventures of Priscilla, Queen of the Desert fait partie de cette catégorie de films qui sont le rêve de tout producteur : le film fait avec des bouts de ficelle, auquel personne ne croit, qui sort dans un semi-anonymat et devient en quelques semaines un film-culte.
Et ce sort envié, ce sont deux films australiens sortis en janvier 1995 qui l’ont connu : Muriel’s Wedding sorti le 18 et Priscilla sorti le 4.
Autre point commun : les deux films nous ont fait découvrir la fascination des Australiens pour le groupe pop suédois ABBA. Mais là s’arrête la comparaison : pour excellents que puissent être les deux productions, il est difficile de mettre en parallèle une comédie de mœurs réaliste, vernie au vitriol, et une comédie déjantée (même si cette dernière égratigne au passage les bouseux australiens).
Comme toujours dans ce genre de phénomène, il est très difficile d’expliquer le succès : comme le disent (et l’ont toujours dit) les producteurs, « Si on connaissait la recette de ce qui fait le succès d’un film, ça se saurait ! ».
Ici, à qui peut-on attribuer ce succès de curiosité qui s’est très vite transformé en succès d’estime ? Il y a d’abord l’originalité de l’histoire, l’excellence de l’interprétation, la fascination pour le bush (surtout si on met trois drag-queens dedans !) et surtout, les fabuleux costumes de Lizzy Gardiner et Tim Chappel : combien de personnes sont allés voir Priscilla parce qu’elles avaient entendu parler de la robe en tongs d’Hugo Weaving ?
Mais il ne faudrait pas oublier un autre atout de cette comédie inclassable, ses dialogues.
Terence Stamp, la star du film, interprétait depuis quelques années des truands dans des films extrêmement violents. Pour Priscilla, il opéra un virage à 180° pour incarner Bernadette, ex-star d’un groupe fameux de transsexuels australiens ; les critiques s’empressèrent de souligner ce virage, feignant d’oublier (mais l’avaient-ils jamais su ? ...) que le même Terence Stamp dans les années soixante s’était rendu célèbre pour ses interprétations de rôles ambigus comme le collectionneur de L’Obsédé (The Collector) de William Wyler, le fragile Billy Budd de Peter Ustinov, l’alter ego asexué de la Modesty Blaise de Joseph Losey, le troublant Toby Dammitt des Histoires extraordinaires de Fellini et, surtout, l’étrange « visiteur » du Théorème de Pasolini. Bien évidemment, Bernadette n’a rien d’ambigu : le tout jeune Ralph est devenu cette dame si chic et si drôle. Stamp n’accepta le rôle que du bout des lèvres, terrorisé qu’il était (de son propre aveu) de jouer un transsexuel. Une petite réserve, toutefois, concernant l’interprétation de Stamp : il n’est, effectivement, pas très à l’aise dans les numéros de cabaret (comme le numéro à transformations de Finally, d’autant que ses deux partenaires, Hugo Weaving et Guy Pearce sont, eux, parfaitement crédibles sur une scène de music-hall : plus de répétitions, peut-être ?).
Mais, à cette réserve près, l’interprétation est superbe tant dans les quatre rôles principaux (j’y inclus Bill Hunter dans le rôle de Bob) que dans les rôles secondaires qu’on a envie de tous citer : Shirley, la « camionneuse » homophobe du pub de Broken Hill, l’aborigène qu’ils vont faire danser sur I Will Survive, Cynthia, l’épouse coréenne, hystérique et « championne de ping-pong » de Bob.
Et tous ces excellents comédiens ont pour se défendre, des dialogues ciselés dans une histoire dingue, mais très finement écrite, et des costumes époustouflants : une perruque faite avec des « pailles » multicolores, des pantalons façon « vraies » pattes d’éléphant, une combinaison toute en strass pour chanter La Traviata au sommet du bus et, surtout, la robe en tong déjà citée.
Décidément, tout contribuait à faire de Priscilla un film d’exception.
En plus, il ne ressemble à aucun autre film, même si, un an plus tard, Beeban Kidron s’essaya à une pâle resucée de Priscilla avec To Wong Foo, Thanks for Everything, Julie Newmar(Extravagances) dans lequel deux super héros du cinéma « mâle américain », Wesley Snipes et Patrick Swayze, singeaient les trois divas de Priscilla dans un film plaisant, mais pas vraiment à la hauteur.
N’est pas culte qui veut !
 

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