lundi 26 avril 2021

L’Année dernière à Marienbad

 

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L’Année dernière à Marienbad (1961) d’Alain Resnais


Dans le château de Marienbad, un homme croise plusieurs fois la même femme. Il finit par l’aborder ; ils se sont connus l’année dernière et ont eu une liaison. La femme ne se souvient de rien, mais l’insistance de l’homme finit par la persuader que tout cela a bien eu lieu.

Alain Resnais tient une place à part dans le cinéma français, la place dévolue habituellement aux expérimentateurs. Dans les domaines pragmatiques comme l’économie ou la politique, on les regarde comme de doux dingues. Dans les domaines de la recherche, ils sont des pivots et sont très respectés. Dans le domaine artistique, l’importance qu’on leur accorde est affaire de mode ou d’engouement. Resnais est toujours encensé, très rarement critiqué et à juste titre, puisque ses expérimentations sont presque toujours des réussites.

N’en déplaise à ses thuriféraires, Resnais, ici, a raté son coup. Les méandres de la mémoire, jouant sur des évènements qui se répètent dans le même cadre, auraient pu (auraient dû, même, avec Resnais !) constitué une des réussites du réalisateur de Providence auquel L’Année dernière à Marienbad fait penser. Mais ce que réussit la fiction fantasmatique pour le romancier dans Providence, la mémoire pure ne peut le faire dans un film : intéresser le spectateur.

La très belle réalisation glacée de Resnais, cette caméra perpétuellement en mouvement entre un décor dont le rococo évoque également le mouvement et des personnages toujours immobiles, se heurte à la vacuité d’un scénario trop lâche de Robbe-Grillet, à la musique languissante de Francis Seyrig, du jeu (déjà) asthmatique et à la démarche chaloupée de Delphine Seyrig et surtout à ces poses, ces poses hiératiques dont le temps accuse le kitsch façon « New Look » de Christian Dior, années 50.

On dit souvent d’un film qui n’a « rencontré » ni son public, ni la critique lors de sa sortie et qu’on redécouvre quelques années plus tard, qu’il devrait être réévalué.

C’est le cas de L’Année dernière à Marienbad, mais il s’agit ici, naturellement, du contraire d’une réhabilitation.

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