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Midnight in the Garden of Good and Evil (Minuit dans le jardin du bien et du mal) de Clint Eastwood (1998)
John Kelso, jeune écrivain, est envoyé à Savannah par le journal « Town and Country » pour faire un reportage sur la fameuse « Christmas Party » de James Williams, un richissime collectionneur d’objets d’art, propriétaire de la somptueuse villa Mercer, construite par l’aïeul de Johnny Mercer, le célèbre parolier.
Le soir de la somptueuse réception, Jim Williams reçoit la visite de Billy Hanson, « employé » de Jim et surtout petite gouape amant du même Jim. Billy est saoul et violent et il menace Jim devant John.
Au milieu de la nuit, John est réveillé par les sirènes de police : Jim vient de tuer Hanson.
Au départ, il y a un semblant d’intrigue criminelle avec enquête et scènes de prétoire, si chères au public américain. Mais tout cela n’a pas la moindre importance.
Comme dans ses westerns, Eastwood nous montre un « étranger », un Yankee, en visite dans un Sud profond pour le moins déconcertant : un homme qui promène une laisse parce que le chien dont il a eu la charge en héritage est mort, un autre qui ne sort pas sans ses mouches qu’il « tient en laisse » accrochées à son visage et Lady Chablis, une drag-queen, qui profite du moment de sa déposition devant le tribunal pour faire son numéro, se croisent dans la bonne ville bourgeoise de Savannah où, au-delà de conventions mondaines très rigides, on confit sa défense et ses intérêts au Vaudou pratiqué par Minerva qui semble organiser des intrigues qui vont au-delà de l’enquête criminelle « prétexte ». Le titre se réfère d’ailleurs au cimetière où ont lieu ces étranges pratiques.
Et c’est le film lui-même qui devient déconcertant : il s’ouvre et se ferme sur Minerva qui est, finalement, le personnage central et qui tient les personnages en laisse comme les mouches du premier juré. Et John Kelso est séduit par toute cette bizarrerie : il déclare à son agent qu’à côté des « particularités » de Savannah, « … New York est chiant ».
Eastwood bénéficie, on le sait, d’un certain engouement cinéphilique, tout au moins en France. Or cet engouement ne semble pas toujours justifié : les états d’âme de son faux John Huston dans Chasseur blanc, cœur noir, pour ne citer que celui-là, peuvent paraître dénués du moindre intérêt. Mais ce qu’on ne peut retirer à l’ex-cow-boy de Sergio Leone, c’est le talent de créer une atmosphère prégnante et à ce niveau-là Minuit dans le jardin du bien et du mal est totalement maîtrisé et abouti.
Des interprètes d’exception participent de cette maîtrise : truculents, originaux, ils incarnent des personnages qui, avant tout, vont s’assumer jusqu’au surréalisme, depuis le « nouveau riche » homosexuel jusqu’à l’ex-diplômé en droit qui ne sort pas sans ses mouches. Grâce à eux, en tête desquels John Kusack et Kevin Spacey font merveille, Eastwwod nous entraîne, et avec bonheur, bien loin des pesants clichés Tennessee Williamsiens comme de l’imagerie d’Autant en emporte le vent.
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