lundi 12 avril 2021

La Vie des autres

 

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Leben der Anderen (La Vie des autres) de Florian Henckel von Donnersmarck (2006)

En 1984, le capitaine Gerd Wiesler est officier de renseignement à la STASI. Très sérieux, très consciencieux, très socialiste, le capitaine Wiesler accomplit son labeur avec un grand professionnalisme, si ce n’est un grand enthousiasme : son labeur, c’est l’interrogatoire et la surveillance des suspects.

Pour l’heure, le suspect c’est Georg Dreyman, un dramaturge à la mode, encensé par le régime. Et c’est le ministre de la culture en personne qui le suspecte et a toutes les raisons pour ça : Christa-Maria Sieland, interprète et compagne du « suspect » est convoité par le ministre qui a tous les moyens pour se débarrasser d’un rival gênant.

Lorsque le capitaine Wiesler s’en aperçoit, ses profondes convictions commencent à vaciller et le parfait petit gestapiste entre en résistance.

Après le grand passage à vide des années 80 et 90, le cinéma allemand refait parler de lui et dans le meilleur sens. Il y eut d’abord une comédie Goodbye Lenin, somme toute assez moyenne, mais suffisamment originale pour avoir été remarquée. Puis, il y eut La Chute en 2004 qui osait l’inconcevable : 2h30 de fiction racontant la fin d’Hitler et du 3ème Reich. Et l’année dernière, il y eut De l’autre côté qui s’interrogeait sur la vie sociale en Allemagne actuellement.

Mais le plus important, n’est-il pas cette Vie des autres, ce film fêté, adulé, primé partout, à Venise, aux Oscars, aux Césars, aux David de Donatello ?

Tous ces jurys ont enfin récompensé un film remarquable, le cinquième d’un réalisateur de 33 ans (au moment des faits) qui en était aussi le scénariste.

La perfection n’est paraît-il pas de ce monde, mais on peut se demander ce qu’on pourrait reprocher à ce film. Le scénario est remarquable de précision, ni invraisemblable, ni prévisible, les acteurs sont tous parfaits à commencer par Ulrich Mühe (trop tôt disparu en juillet dernier à l’âge de 54 ans d’un cancer de l’estomac) et fluide sans ostentation.

Dans le monde de la STASI, on ne peut échapper à la machine : faire une plaisanterie sur Honecker peut coûter une carrière et un ministre amoureux de la femme d’un homme en vue peut valoir le bannissement de cet homme. Les apparatchiks usent et abusent du pouvoir et la RDA se retrouvent remplies de victimes potentielles de dizaines de petits Staline.

Malgré sa complète allégeance au régime, l’honnête Wiesler ne peut accepter cette « combine » et, tout en éprouvant probablement les mêmes sentiments que le ministre vis-à-vis de Christa-Maria, il va prendre le contre-pied en essayant de sauver le dramaturge qui n’apprendra la vérité qu’après la chute du mur.

Tout est maîtrisé, d’une justesse parfaite, dans les dialogues, dans le jeu (remarquable) de l’ensemble de la distribution : Martina Gedeck (Christa-Maria), Sebastian Koch (Dreyman), Ulrich Tukur (l’effrayant Grubitz, fonctionnaire de police arriviste et cynique), Thomas Thieme (l’adipeux ministre de la culture Hempf), sans oublier, bien sûr Ulrich Mühe.

Quelques films sont encensés et on se demande pourquoi. Se demander pourquoi La Vie des autres a obtenu un tel succès, ne peut vouloir dire qu’une chose : c’est qu’on n’a pas vu le film.

 

 

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