dimanche 9 octobre 2022

L’Autre côté de l’espoir

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Toivon Tuolla Puolen (L’Autre côté de l’espoir) d’Aki Kaurismäki (2017)

Wikström est en pleine crise existentielle. Représentant de commerce, il ne supporte plus son travail et le quitte ainsi que son épouse.

Khaled se retrouve en Finlande sans l’avoir voulu. Il a fui sa Syrie natale et fait une demande d’asile.

Mais il est débouté et doit être reconduit à la frontière. Il s’enfuit et vit comme un clochard, pourchassés par des voyous néo-nazis.

Wikström achète un restaurant assez minable qu’il paie comptant.

Khaled se cache à proximité du restaurant de Wikström et lorsque les deux hommes se rencontrent, Le clandestin colle un coup de poing au restaurateur.

Contre toute attente, Wikström l’engage.

Kaurismäki est un humaniste

Il n’y a (presque) jamais de vrais méchants dans ses films et quand il y en a, ce ne sont que des accessoires, comme les tarés nazis ici.

Il semble qu’en Finlande, à moins que ce ne soit que dans les films de Kaurismäki, tout le monde parle doucement, agît lentement et cette espèce de componction donne à ce film-ci son style hiératique si particulier.

L’Autre côté de l’espoir, c’est le destin, d’abord parallèle, de deux hommes qui commencent une nouvelle vie, l’un par goût, l’autre par nécessité.

Mais ces deux destins ne resteront pas parallèles puisqu’ils vont se rejoindre à l’occasion d’un échange de « bourre-pifs » qui se conclura par l’embauche de l’un par l’autre.

Nous allons voir s’opposer les manières rudes, parfois brutales, de braves gens très bourrus qui vont accorder l’asile du jeune Syrien à la politesse glacée et hypocrite des instances officielles « d’accueil » qui vont refuser ledit accueil au même.

Le point de vue officiel de cette administration, c’est « puisqu’à Alep, les choses vont mieux, pourquoi accorder l’asile politique à ces gens qui ne risquent plus rien dans leur pays ? ». Nonobstant la guerre qui sévit toujours, c’est un peu comme si on disait « Puisque toutes les maisons ont été rasées, plus rien ne risque de tomber », un peu comme si « Les choses vont mieux » signifiait exactement, « Les choses vont bien ».

Le film est doux-amer dans le plus pur style Kaurismäki, agrémenté d’un humour ravageur. Le restaurant que Wikström acquiert est tout sauf « une bonne affaire » : il est visiblement au bord du dépôt de bilan, l’ex-directeur semble un petit peu plus que louche et les trois employés, auxquels va s’ajouter Khaled, sont très « bras cassés ». Le seul moment où ils sont efficaces, c’est lors de la visite d’une commission sanitaire où ils réussissent à planquer tout ce qui pourrait poser problème et il y a beaucoup à cacher, à commencer par Khaled !

Les tentatives de « diversification » de l’établissement en restaurant japonais (avec sushis de hareng !!!) ou en restaurant indien sont hilarantes.

A travers le personnage de Wikström, c’est à son père, VRP spécialisé dans les chemises, que Kaurismäki rend hommage.

La mise en scène, toujours inventive, de Kaurismäki est à la fois démonstrative et légère, ce que peu de réalisateur savent réussir.

Effectivement, Kaurismäki aime l’humanité. Pas une humanité idéalisée, un monde de bisounours mais, comme le dit le critique Alain Masson, « une humanité vraie sans scrupule, mais aimable et charitable, la fraternité clandestine des filous et des métèques. »

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