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Les Invités de mon père (2009) d’Anne Le Ny
Lucien Paumelle a quatre-vingts ans. C’est un ancien médecin, héros de la Résistance à 17 ans, défenseur de la cause des femmes et militant du droit à l’avortement.
A présent il milite dans une association qui vient aide aux sans-papiers. Il a même décidé d’en recevoir chez lui, ce qui ravit sa fille Babette, mais qui déplait à son fils Arnaud qui ne partage pas ses idées et à l’épouse de celui-ci Karine qui craint surtout « les Noirs et les Arabes ».
Mais Lucien a déjà choisi ses sans-papiers : il s’agit d’une jeune et très jolie Moldave, Tatiana et de sa petite fille Sorina. Et pour que Tatiana et sa fille obtiennent plus facilement leurs papiers, Lucien a épousé Tatiana.
Un héros gauchiste devient un vieux libidineux. Sa fille militante, coincée et admirative va se pochetroner, s’envoyer en l’air avec un collègue et relativiser l’admiration qu’elle porte à son père. Son fils, avocat qui ne l’aimait pas, va se mettre à l’admirer à cause de ses faiblesses. Rien de nouveau sous le soleil, on est en pleine comédie de mœurs standard à la française. Sauf que…
Sauf que le frère et la sœur vont se découvrir mutuellement que le héros ne l’était pas tant que ça vis-à-vis de ses enfants : il a toujours méprisé son fils pour ce qu’il était (un avocat), allant jusqu’à lui couper les vivres, mais il ne dédaigne pas lui demander d’intervenir auprès d’un de ses anciens condisciples qui est secrétaire d’état pour l’obtention des papiers de la belle Moldave.
Quant à la Moldave elle-même, elle est assez contente de mettre sa fille dans une école où il n’y a pas « trop de Noirs et d’Arabes ».
Tout est vu par ce frère et cette sœur qui découvre que leur père est peut-être un gentil salaud, un pur et dur qui peut tomber amoureux et que la femme qu’il a choisie peut être un peu pute pour survivre.
Arnaud découvre que son père peut être comme lui et Babette qu’il peut être doux de se relâcher et que la noblesse des sentiments tout le temps, c’est lassant.
C’est finalement le cheminement de ces deux personnages qui est le sujet du film et c’est très loin d’être inintéressant.
Tout cela est porté par une mise en scène qu’on ne remarque pas tant elle est fluide, des dialogues superbes sans être « dialoguisants » et surtout un casting impeccable. Le trio de tête d’abord : Michel Aumont, superbe, égoïste et un peu perdu, Fabrice Luchini, un peu paumé lui aussi, mais assez goguenard pour le cacher et Karin Viard qui regarde tout son monde s’écrouler sans rien comprendre.
Et puis, il y a les deux superbes seconds rôles : Valérie Benguigui, bru pête-sec et raciste, et Veronica Novak, sans-gêne, dure, âpre au gain (comme dit Lucien : « On ne peut pas juger avec nos critères »). Les deux femmes sont assez grandioses dans des rôles pas franchement sympathiques.
On retrouve dans le scénario la causticité de Luc Béraud, mais il faut reconnaître que ce sont les dialogues d’Anne Le Ny (et sa mise en scène) qui emportent le morceau.
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