lundi 10 octobre 2022

Le Bon Dieu sans confession

=

Le Bon Dieu sans confession (1953) de Claude Autant-Lara


François Dupont vient de mourir. Sa femme, son fils, sa fille, son associé et Jeanine Frejoul, la femme qu’il entretenait depuis des années sans qu’elle n’ait jamais été sa maîtresse, suivent son enterrement en se remémorant les évènements qui ont causé cette mort subite.

Les attaques des « jeunes loups » de la « Nouvelle vague » contre la « qualité française » en général (Duvivier, Clouzot, Delannoy, etc…) et contre Autant-Lara en particulier, ont souvent été excessive et injustes. Souvent, mais pas toujours…

Ici, par exemple, la morale est bourgeoise, l’intrigue rebattue et le scénario bâclé. Pour faire original, Autant-Lara s’amuse à briser la continuité chronologique de façon totalement arbitraire et parfaitement ratée : on a la très nette impression d’une interversion de bobines par le projectionniste.

Certains films récents ont expérimenté ces formes de récits « brisés » avec bonheur. Au premier rang de ces films, on trouve Pulp Fiction dont le scénario, très travaillé, constitue l’intérêt majeur.

Mais que dire de ce montage aléatoire et injustifié si ce n’est qu’il est d’une maladresse surprenante de la part d’un cinéaste qui n’a certes pas que des qualités, mais à qui on aurait beaucoup de mal à reprocher un manque de maîtrise dans la conduite d’un récit.

En dehors de ce défaut majeur, le jeu des acteurs est tout à fait « qualité française » dans la pire acception du terme. Quant à l’histoire (flashes-back autour d’un enterrement), on a vu ça mille fois, y compris dans certains chefs d’œuvres (La Comtesse aux pieds nus).

On s’est beaucoup extasié sur l’interprétation de Darrieux : c’est oublier un peu vite un film assez proche au niveau de l’intrigue, mais authentique chef d’œuvre cette fois, La Vérité sur Bébé Donge, d’ailleurs construit de la même façon, mais sans la même nonchalance, et réalisé deux ans avant celui-ci. Le reste de l’interprétation est assez consternant à l’exception d’Henri Vilbert, qui se tire plutôt bien d’un rôle pontifiant, et, dans un tout petit rôle, du tout jeune Claude Berri : Carette fait son numéro habituel, ce qui n’est même pas drôle ici, et les autres comédiens, y compris Grégoire Aslan, sont tout à fait calamiteux, la palme allant à Ivan Desny qui parle faux de bout en bout.

Quant au portrait de garce dont les défenseurs de ce mauvais produit font leurs choux gras, il est artificiel et se situe aux antipodes des authentiques garces malfaisantes du cinéma français que sont, entre autres, Janie Marèze, Simone Signoret ou Danièle Delorme, que ce soit chez Renoir (La Chienne), Allégret (Manèges) ou Duvivier (Voici le temps des assassins).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire