mercredi 27 mai 2020

Faute d’amour



Нелюбовь (Nelioubov – Faute d’amour) d’Andrei Zvinguintsev
Genia et Boris sont encore mariés, mais alors que Genia espère se faire épouser par Anton, un homme riche, Boris vit déjà avec Masha qu’il a mise enceinte.
Le problème, c’est qu’au milieu de ce couple qui ne peut pas se voir sans se déchirer, il y a Aliocha leur fils de 12 ans qui doit subir leurs incessantes disputes.
Un matin, Aliocha part pour l’école et disparaît.
Il est très difficile d’aimer un film dans lequel on ne se sent en empathie avec personne (le titre original signifie « Sans amour »). Au sein de cette famille à laquelle on n’aimerait pas appartenir, seul l’enfant attire la sympathie : on est même bouleversé par lui lorsqu’il pleure pendant que ses sinistres parents s’engueulent en se le jetant à la gueule comme une patate chaude.
La disparition de l’enfant ne sera pas résolue dans le film et on peut légitimement penser que son sort a été fatal, mais rien ne permet de le conclure réellement.
Ce pauvre enfant (j’emploie volontairement ce terme mélodramatique) n’est pas seulement l’enfant d’un homme et d’une femme qui ne s’aiment pas, c’est l’enfant non désiré d’un homme pour qui il n’était que l’instrument d’une normalité « orthodoxe » (il semble que le patron de la boîte dans laquelle il travaille soit intégriste) qui permettrait sa réussite professionnelle et d’une femme qui s’est « faite avoir ». Et, contrairement à ce qu’on peut trouver par exemple chez Simenon (un couple qui ne s’aime pas, mais pour qui on parvient à éprouver une certaine empathie), ici, il n’est question que de haine ouverte entre une arriviste un peu pute et une immonde tarte molle qui ne saura jamais être un père, comme nous le montre la dernière séquence dans laquelle on le voit et dans laquelle on peut subodorer à sa façon de traiter son autre enfant qu’il est définitivement répugnant et irrécupérable.
Sa nouvelle pétasse ne vaut pas mieux : elle se plaint d’être « délaissée », la pauvre, pendant que lui est « obligé » (comme il le dit) de participer aux recherches de la police.
Alors bien sûr, la réalisation est remarquable et les comédiens jouent leurs personnages antipathiques avec brio : Alexey Rozin (Boris le père), Maryana Spivak (Zhenya, la mère) ainsi que Marina Vasilyeva (Masha, la « nouvelle » de Boris), Natalia Postapova (la mère de Zhenya, stupéfiante gorgone vulgaire le temps d’une seule séquence) et le jeune Matvey Novikov (Alyocha, l’enfant qui pleure et qui disparaît).
Mais on se demande si Zviaguintsev n’a pas un peu chargé la barque.
A moins qu’il ne s’agisse d’une charge féroce bien que voilé sur la Russie actuelle, celle de Poutine comme celle qui sévit au Donbass (dont il est beaucoup question sur les écrans que nous voyons en arrière plan).

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